1 00:00:05,710 --> 00:00:09,520 Nos prochaines vidéos vont consister à reprendre les diverses obligations 2 00:00:09,720 --> 00:00:12,280 du vendeur que l’on a énumérées dans la sous-section première, 3 00:00:13,480 --> 00:00:17,830 en examinant précisément leur régime juridique, notamment leurs conditions 4 00:00:18,030 --> 00:00:19,360 de mise en œuvre et leurs effets. 5 00:00:19,560 --> 00:00:24,520 Sous-section 2 : le régime juridique des obligations du vendeur. 6 00:00:26,770 --> 00:00:30,280 On traitera successivement des obligations d’information et de 7 00:00:30,480 --> 00:00:33,820 conseil, paragraphe premier, de l’obligation de délivrance qui 8 00:00:34,020 --> 00:00:37,480 comprend la conformité au sens du droit civil, paragraphe deux, 9 00:00:38,230 --> 00:00:40,660 des obligations de garantie, paragraphe trois. 10 00:00:40,900 --> 00:00:44,110 Trois obligations de garantie : la garantie des vices cachés, 11 00:00:44,310 --> 00:00:48,490 la garantie d’éviction et la garantie de conformité au sens du Code de 12 00:00:48,690 --> 00:00:49,450 la consommation. 13 00:00:49,650 --> 00:00:54,100 Enfin, nous traiterons dans un dernier paragraphe de l’obligation 14 00:00:54,300 --> 00:00:58,510 de sécurité résultant des articles 1245 et suivants du Code civil, 15 00:00:58,870 --> 00:00:59,980 ce sera un paragraphe quatre. 16 00:01:01,150 --> 00:01:04,420 Paragraphe premier : les obligations d’information et 17 00:01:04,620 --> 00:01:05,380 de conseil. 18 00:01:06,160 --> 00:01:09,940 Le pluriel est de mise car ces obligations sont d’une très grande 19 00:01:10,140 --> 00:01:10,900 diversité. 20 00:01:11,440 --> 00:01:14,470 En droit des contrats, l’autonomie de la volonté demeure 21 00:01:14,670 --> 00:01:18,490 le principe et elle implique que chacun est censé être le meilleur 22 00:01:18,690 --> 00:01:20,290 juge de ses propres intérêts. 23 00:01:21,160 --> 00:01:25,840 Il appartient normalement à chacune des parties de s’informer elles-mêmes 24 00:01:26,620 --> 00:01:30,580 sur les tenants et aboutissants du contrat, en particulier sur 25 00:01:30,780 --> 00:01:32,800 les caractéristiques de la chose vendue. 26 00:01:33,000 --> 00:01:39,190 Toutefois, à partir de la fin des années 1950, la loi et le juge 27 00:01:39,390 --> 00:01:41,410 ont quelque peu modifié cette approche. 28 00:01:42,280 --> 00:01:46,180 Quatre manifestations de ce phénomène peuvent être rapidement évoquées. 29 00:01:46,380 --> 00:01:51,250 Premièrement, la loi a instauré ce que l’on appelle aujourd’hui 30 00:01:51,450 --> 00:01:53,140 le formalisme informatif. 31 00:01:53,890 --> 00:01:57,880 Il s’agit de mentions qui doivent obligatoirement figurer dans certains 32 00:01:58,080 --> 00:02:01,420 contrats et qui sont destinées à informer l’acheteur pour qu’ils 33 00:02:01,620 --> 00:02:03,370 émettent un consentement éclairé. 34 00:02:03,570 --> 00:02:07,390 Aujourd’hui, le droit de la consommation utilise abondamment 35 00:02:07,590 --> 00:02:11,440 cette technique pour compenser le déséquilibre d’information qui 36 00:02:11,640 --> 00:02:15,370 existe très souvent entre le professionnel et le consommateur. 37 00:02:16,330 --> 00:02:19,450 Pour la vente à distance et la vente hors établissement, 38 00:02:19,650 --> 00:02:23,920 par exemple, l’obligation d’information précontractuelle est réglementée 39 00:02:24,120 --> 00:02:27,550 avec précision dans le livre II du Code de la consommation. 40 00:02:28,360 --> 00:02:33,850 La sanction de ce formalisme informatif réside logiquement dans la nullité 41 00:02:34,050 --> 00:02:37,210 du contrat qui omet les mentions obligatoires. 42 00:02:38,530 --> 00:02:43,660 Deuxième manifestation de l’information due à l’acheteur, l’article L. 43 00:02:43,860 --> 00:02:49,810 111-1 du Code de la consommation pose une obligation générale 44 00:02:50,010 --> 00:02:53,260 d’information due par les professionnels aux consommateurs. 45 00:02:53,950 --> 00:02:58,090 Cela concerne notamment les caractéristiques essentielles du 46 00:02:58,290 --> 00:02:59,050 bien vendu. 47 00:02:59,250 --> 00:03:03,520 À noter qu’il n’y a pas de sanction civile autonome de cette règle 48 00:03:03,720 --> 00:03:07,690 d’information, la sanction réside dans une simple amende administrative 49 00:03:07,990 --> 00:03:09,220 selon l’article L. 50 00:03:09,420 --> 00:03:10,180 131-1. 51 00:03:11,620 --> 00:03:15,520 La sanction civile passe seulement par l’application du droit commun 52 00:03:15,720 --> 00:03:17,020 dont nous allons parler juste après. 53 00:03:17,220 --> 00:03:22,000 Troisièmement, le Code civil a également exigé, dès 1804, 54 00:03:22,200 --> 00:03:26,050 que le vendeur explique clairement ce à quoi il s’oblige. 55 00:03:26,250 --> 00:03:30,250 C’est l’article 1602 dans son alinéa premier, que nous avons déjà cité, 56 00:03:30,450 --> 00:03:33,520 le vendeur explique clairement ce à quoi il s’oblige. 57 00:03:34,540 --> 00:03:38,350 Comme on l’a vu, la jurisprudence a été beaucoup plus loin et elle 58 00:03:38,550 --> 00:03:42,790 a transfiguré cette obligation d’explication en une véritable 59 00:03:42,990 --> 00:03:47,020 obligation d’information qui repose d’ailleurs désormais sur l’obligation 60 00:03:47,220 --> 00:03:49,720 de délivrance de l’article 1604. 61 00:03:50,860 --> 00:03:54,070 Même dans le cas de la vente, beaucoup d’arrêts se fondent cependant 62 00:03:54,270 --> 00:03:58,810 sur le seul droit commun des contrats pour faire peser sur le vendeur 63 00:03:59,010 --> 00:04:00,310 cette obligation d’information. 64 00:04:00,510 --> 00:04:04,510 Ils en appellent en particulier à la bonne foi et à l’équité. 65 00:04:05,380 --> 00:04:09,400 Cela correspond à l’obligation d’information de droit commun qui 66 00:04:09,600 --> 00:04:12,370 s’applique à la vente, comme en principe, à tous les autres 67 00:04:12,570 --> 00:04:13,330 contrats. 68 00:04:13,530 --> 00:04:16,480 À noter que cette obligation d’information de droit commun, 69 00:04:17,080 --> 00:04:21,670 dont nous allons bientôt reparler dans notre A, a été consacrée par 70 00:04:21,870 --> 00:04:27,760 l’ordonnance du 10 février 2016 à l’article 1112-2 du Code civil. 71 00:04:27,960 --> 00:04:34,360 Quatrièmement, dans certains types de vente, la loi vient ajouter 72 00:04:34,560 --> 00:04:38,380 des obligations d’information très précises qu’elle réglemente avec 73 00:04:38,580 --> 00:04:39,340 le plus grand soin. 74 00:04:40,240 --> 00:04:43,900 On peut parler à leur sujet d’obligation d’information spécifique. 75 00:04:44,800 --> 00:04:49,000 Le cas le plus connu est certainement celui de la vente immobilière en 76 00:04:49,200 --> 00:04:50,560 application de l’article L. 77 00:04:50,760 --> 00:04:56,860 271-4 du Code de la construction et de l’habitation, le CCH. 78 00:04:57,640 --> 00:05:02,830 Je cite ce texte : "En cas de vente de tout ou partie d’un immeuble bâti, 79 00:05:03,250 --> 00:05:08,230 un dossier de diagnostic technique fourni par le vendeur est annexé 80 00:05:08,430 --> 00:05:10,660 à la promesse de vente ou, à défaut de promesse, 81 00:05:10,930 --> 00:05:12,730 à l’acte authentique de vente". 82 00:05:14,140 --> 00:05:18,370 La liste des éléments techniques qui doivent être annexés à l’acte 83 00:05:18,570 --> 00:05:23,140 de vente n’a cessé de grossir avec le temps : risque d’exposition au plomb, 84 00:05:23,350 --> 00:05:26,830 présence d’amiante, de termites, état d’une installation de gaz, 85 00:05:27,030 --> 00:05:30,760 de l’installation électrique, exposition aux risques naturels 86 00:05:30,960 --> 00:05:34,390 et technologiques, performance énergétique, les immeubles étant 87 00:05:34,590 --> 00:05:36,400 classés en catégories A, B, C, D, etc. 88 00:05:38,710 --> 00:05:42,790 Avec toutes ces annexes obligatoires destinées à informer l’acheteur, 89 00:05:43,540 --> 00:05:48,550 un acte de vente immobilière fait désormais plusieurs dizaines de pages. 90 00:05:49,510 --> 00:05:52,690 Le grand 2 du même article au sein du Code de la construction et de 91 00:05:52,890 --> 00:05:56,980 l’habitation prévoit les sanctions qui s’appliquent dans l’hypothèse 92 00:05:57,460 --> 00:06:01,420 où les documents exigés par la loi ne sont pas remis ou ne sont 93 00:06:01,620 --> 00:06:02,380 plus valides. 94 00:06:02,800 --> 00:06:04,390 Ces sanctions sont variables. 95 00:06:04,900 --> 00:06:08,380 Dans la plupart des cas, la loi prévoit toutefois que le 96 00:06:08,580 --> 00:06:13,120 vendeur ne peut pas s’exonérer de la garantie contre les vices 97 00:06:13,320 --> 00:06:16,450 cachés correspondants lorsqu’il a omis une information, 98 00:06:16,650 --> 00:06:22,030 ce qui constitue une sanction originale qui mêle obligation d’information 99 00:06:22,230 --> 00:06:25,870 sur ces éléments techniques et possibilité de se prévaloir de 100 00:06:26,070 --> 00:06:27,670 la garantie des vices cachés pour le vendeur. 101 00:06:29,110 --> 00:06:32,440 En dehors de ce type de règles spéciales, les obligations 102 00:06:32,640 --> 00:06:35,800 d’information et de conseil posées par la jurisprudence ont vocation 103 00:06:36,000 --> 00:06:37,270 à jouer dans toutes les ventes. 104 00:06:38,110 --> 00:06:40,960 Nous parlerons d’abord du principe de ces obligations, A, 105 00:06:41,590 --> 00:06:44,560 ensuite de leur portée qui est extrêmement variable, 106 00:06:44,760 --> 00:06:45,520 B. 107 00:06:45,720 --> 00:06:46,480 A . 108 00:06:46,900 --> 00:06:50,860 Le principe des obligations d’information et de conseil. 109 00:06:52,180 --> 00:06:55,870 Les deux notions, information et conseil, doivent être distinguées. 110 00:06:56,070 --> 00:07:00,270 L’obligation d’information présente un caractère objectif. 111 00:07:00,470 --> 00:07:04,720 Il s’agit pour le vendeur d’expliquer à l’acheteur les caractéristiques 112 00:07:04,920 --> 00:07:08,200 techniques du bien vendu et ses modalités d’utilisation, 113 00:07:08,680 --> 00:07:12,370 avec éventuellement des mises en garde en cas de danger potentiel. 114 00:07:13,240 --> 00:07:16,780 Le vendeur doit, par exemple, expliquer comment fonctionne 115 00:07:17,350 --> 00:07:20,590 l’ordinateur que l’acquéreur vient d’acheter. 116 00:07:20,790 --> 00:07:25,960 L’obligation de conseil présente au contraire un aspect subjectif. 117 00:07:26,320 --> 00:07:31,270 Il s’agit ici d’orienter le choix de l’acheteur en l’éclairant, 118 00:07:31,470 --> 00:07:36,100 en le conseillant sur l’opportunité même de son achat en fonction de 119 00:07:36,300 --> 00:07:37,690 ses besoins spécifiques. 120 00:07:38,260 --> 00:07:42,430 De quel type d’ordinateur le client a-t-il besoin, par exemple, 121 00:07:42,880 --> 00:07:45,610 en fonction de l’utilisation qu’il compte en faire. 122 00:07:47,110 --> 00:07:49,990 Comme nous le verrons plus loin dans cette vidéo, la nature et 123 00:07:50,190 --> 00:07:54,760 la force de ces obligations varient en fonction des circonstances de 124 00:07:54,960 --> 00:08:00,220 la cause, c’est-à-dire selon la qualité des parties et selon la 125 00:08:00,420 --> 00:08:01,540 nature du bien vendu. 126 00:08:02,650 --> 00:08:05,380 La jurisprudence est très pragmatique sur ce point. 127 00:08:05,590 --> 00:08:09,670 Tout est donc affaire d’espèce, en dépit des efforts de systématisation 128 00:08:09,870 --> 00:08:10,630 de la doctrine. 129 00:08:11,470 --> 00:08:13,900 La sanction de ces obligations est elle-même variable. 130 00:08:15,010 --> 00:08:19,630 Outre la responsabilité du vendeur, la nullité du contrat peut 131 00:08:19,830 --> 00:08:23,440 éventuellement être prononcée, en particulier sur le fondement 132 00:08:23,640 --> 00:08:26,560 du dol de l’article 1137 du Code civil. 133 00:08:27,040 --> 00:08:31,330 On peut d’ailleurs noter que la réticence dolosive a été à l’origine 134 00:08:31,530 --> 00:08:35,200 du formidable développement des obligations d’information à partir 135 00:08:35,400 --> 00:08:36,160 des années 50. 136 00:08:37,660 --> 00:08:41,380 Conformément au droit commun, c’est au vendeur qu’il appartient 137 00:08:41,580 --> 00:08:45,040 de prouver qu’il a satisfait à son obligation d’information et 138 00:08:45,240 --> 00:08:46,000 de conseil. 139 00:08:46,240 --> 00:08:51,370 Le quatrième alinéa de l’article 1112-1 du Code civil a toutefois 140 00:08:51,640 --> 00:08:52,950 un peu affiné les choses. 141 00:08:53,150 --> 00:08:56,470 Je cite ce texte auquel vous avez déjà dû faire référence l’an dernier : 142 00:08:56,670 --> 00:09:00,760 "Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due 143 00:09:01,090 --> 00:09:06,640 de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette 144 00:09:06,970 --> 00:09:09,640 autre partie de prouver qu’elle l’a fourni". 145 00:09:11,500 --> 00:09:15,730 Après avoir connu un formidable développement dans les années 1970 146 00:09:15,930 --> 00:09:20,710 et 1980, les obligations d’information et de conseil ont été soumises 147 00:09:20,910 --> 00:09:21,820 à certaines limites. 148 00:09:22,020 --> 00:09:25,510 C’est la question de leur portée qu’il faut aborder maintenant. 149 00:09:25,710 --> 00:09:26,470 B. 150 00:09:27,100 --> 00:09:30,850 La portée des obligations d’information et de conseil. 151 00:09:32,230 --> 00:09:36,400 Cette portée dépend de la qualité des parties au contrat et de la 152 00:09:36,600 --> 00:09:37,540 qualité de la chose vendue, premièrement. 153 00:09:39,100 --> 00:09:42,610 Certaines limites sont fondées sur l’attitude de l’acheteur qui 154 00:09:42,810 --> 00:09:44,020 ne doit pas être passif, deuxièmement. 155 00:09:44,380 --> 00:09:45,140 1. 156 00:09:46,450 --> 00:09:49,000 La qualité des parties et de la chose vendue. 157 00:09:50,320 --> 00:09:53,380 On l’a dit, la jurisprudence est pragmatique et distingue en ce 158 00:09:53,580 --> 00:09:57,040 domaine en fonction de trois caractères que peut présenter la chose : 159 00:09:57,460 --> 00:10:01,130 sa nouveauté, sa dangerosité et sa complexité. 160 00:10:02,030 --> 00:10:06,230 Pour les choses complexes, c’est le devoir de conseil qui 161 00:10:06,430 --> 00:10:07,190 est de mise. 162 00:10:07,460 --> 00:10:10,790 Pour les choses dangereuses, le vendeur est tenu d’un devoir 163 00:10:10,990 --> 00:10:15,080 de mise en garde qui est une sorte d’information renforcée sur les 164 00:10:15,280 --> 00:10:16,700 dangers que présente la chose. 165 00:10:16,900 --> 00:10:20,510 Parfois, l’obligation d’information se réduit à peau de chagrin. 166 00:10:20,710 --> 00:10:24,470 C’est le cas par exemple pour les choses standardisées pour lesquelles 167 00:10:24,710 --> 00:10:28,250 la remise d’un simple mode d’emploi sera jugée suffisante. 168 00:10:29,000 --> 00:10:31,550 De manière très logique, les obligations d’information et 169 00:10:31,750 --> 00:10:34,010 de conseil sont ainsi susceptibles de degrés. 170 00:10:35,390 --> 00:10:39,410 Leur intensité est également variable selon la qualité des parties au 171 00:10:39,610 --> 00:10:43,970 contrat, que l’on se place du côté du vendeur ou du côté de l’acheteur. 172 00:10:44,930 --> 00:10:48,470 Cette géométrie variable de l’obligation d’information a été 173 00:10:48,670 --> 00:10:52,760 pleinement consacrée par l’article 1112-1 du Code civil. 174 00:10:53,360 --> 00:10:56,810 Je cite : "Celle des parties qui connaît une information dont 175 00:10:57,010 --> 00:11:00,500 l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit 176 00:11:00,700 --> 00:11:06,080 l’en informer dès lors que légitimement cette dernière ignore cette information 177 00:11:06,320 --> 00:11:08,360 ou fait confiance à son cocontractant". 178 00:11:09,710 --> 00:11:12,110 Dans le droit de la vente, il faut ainsi distinguer, 179 00:11:12,310 --> 00:11:15,590 selon les parties au contrat, vendeur ou acheteur, 180 00:11:16,190 --> 00:11:19,430 et selon leurs qualités, professionnels ou profanes, 181 00:11:19,630 --> 00:11:21,380 professionnels spécialisés ou non. 182 00:11:22,370 --> 00:11:25,670 Du côté du vendeur, ces obligations pèsent particulièrement sur les 183 00:11:25,870 --> 00:11:28,190 professionnels, mais pas seulement. 184 00:11:28,880 --> 00:11:31,220 Tout dépend, là encore, des circonstances. 185 00:11:31,880 --> 00:11:34,670 Lorsque le vendeur est un non-professionnel, l’obligation 186 00:11:35,900 --> 00:11:40,610 peut tout de même exister en fonction du déséquilibre concret des 187 00:11:40,810 --> 00:11:42,410 connaissances par rapport à l’acquéreur. 188 00:11:43,310 --> 00:11:46,880 En principe, le vendeur est en effet censé mieux connaître la 189 00:11:47,080 --> 00:11:47,840 chose qu’il vend. 190 00:11:48,650 --> 00:11:50,360 Lorsque le vendeur est un professionnel, l’obligation 191 00:11:50,560 --> 00:11:54,500 d’information qui pèse sur lui est logiquement plus forte. 192 00:11:55,430 --> 00:12:00,260 Lorsque le vendeur est un professionnel spécialisé dans le type de biens 193 00:12:00,460 --> 00:12:03,680 faisant l’objet du contrat, son obligation est encore renforcée. 194 00:12:04,370 --> 00:12:08,450 Dans ce cas, la jurisprudence lui impose de se renseigner lui-même 195 00:12:09,350 --> 00:12:12,020 afin de pouvoir à son tour informer son client. 196 00:12:13,310 --> 00:12:16,430 On peut citer en ce sens une intéressante décision rendue par 197 00:12:16,630 --> 00:12:23,300 la chambre commerciale de la Cour de cassation le 25 mai 1993 au 198 00:12:23,500 --> 00:12:27,650 sujet d’une société spécialisée dans la vente de systèmes d’alarme. 199 00:12:28,730 --> 00:12:32,030 Dans cette affaire, le système d’alarme vendu n’était pas agréé 200 00:12:32,230 --> 00:12:33,530 par l’assureur de l’acheteur. 201 00:12:34,190 --> 00:12:37,430 Les juges décident que le vendeur aurait dû vérifier ce point. 202 00:12:39,080 --> 00:12:42,110 Du côté de l’acheteur, il faut aussi distinguer trois 203 00:12:42,310 --> 00:12:47,780 hypothèses au moins selon qu’il est profane ou professionnel ou 204 00:12:48,080 --> 00:12:51,200 professionnel de même spécialité que le vendeur. 205 00:12:51,400 --> 00:12:56,840 L’idée, toute simple et très logique, est que plus l’acheteur est compétent, 206 00:12:57,260 --> 00:13:00,740 plus l’obligation d’information et de conseil du vendeur s’allège. 207 00:13:01,460 --> 00:13:06,650 Tout dépend en vérité du déséquilibre des connaissances, comme le souligne 208 00:13:06,850 --> 00:13:09,010 très justement l’article 1112-1. 209 00:13:11,030 --> 00:13:15,560 Il va de soi que tous ces critères de qualité, qualité de la chose, 210 00:13:15,760 --> 00:13:19,190 qualité du vendeur, qualité de l’acquéreur, se combinent entre 211 00:13:19,390 --> 00:13:24,020 eux pour fixer dans chaque cas particulier l’intensité exacte 212 00:13:24,230 --> 00:13:26,210 des obligations d’information et de conseil. 213 00:13:27,350 --> 00:13:30,380 Ces appréciations dépendent du pouvoir souverain des juges du fond, 214 00:13:30,800 --> 00:13:33,830 en fonction des circonstances propres à chaque cause. 215 00:13:35,030 --> 00:13:38,780 Mais au-delà de ces subtiles combinaisons, la jurisprudence 216 00:13:38,980 --> 00:13:43,550 n’est pas insensible, en particulier depuis les années 1990, 217 00:13:44,030 --> 00:13:47,600 à l’attitude qui est celle de l’acheteur lors de la conclusion 218 00:13:47,800 --> 00:13:48,560 du contrat de vente. 219 00:13:48,760 --> 00:13:49,520 2. 220 00:13:49,720 --> 00:13:51,440 L’attitude de l’acheteur. 221 00:13:53,450 --> 00:13:57,080 Dans une certaine mesure, l’acheteur est lui aussi tenu par 222 00:13:57,280 --> 00:13:58,250 un devoir d’information. 223 00:13:59,960 --> 00:14:04,790 Ce devoir est de moins en moins unilatéral selon une tendance 224 00:14:04,990 --> 00:14:08,960 jurisprudentielle qui privilégie ce que l’on appelle parfois un 225 00:14:09,160 --> 00:14:11,630 devoir de collaboration entre les parties. 226 00:14:12,230 --> 00:14:16,490 Le vendeur doit certes informer l’acheteur de ce qu’il sait et 227 00:14:16,690 --> 00:14:19,670 l’interroger sur ce qu’il veut, spécialement pour le conseiller. 228 00:14:20,270 --> 00:14:24,200 Mais réciproquement, l’acheteur doit aussi informer 229 00:14:24,400 --> 00:14:27,860 le vendeur de ce qu’il veut et l’interroger sur ce qu’il sait. 230 00:14:29,030 --> 00:14:32,750 Cela est particulièrement vrai lorsqu’il entend faire un usage 231 00:14:32,950 --> 00:14:36,830 particulier de la chose ou que ses besoins sont spécifiques. 232 00:14:37,030 --> 00:14:41,240 Ainsi, pour certaines choses jadis nouvelles mais qui sont devenues 233 00:14:41,810 --> 00:14:44,600 usuelles avec le temps, on pense en particulier aux 234 00:14:44,800 --> 00:14:48,770 ordinateurs, on doit considérer que c’est désormais à l’acheteur 235 00:14:48,980 --> 00:14:52,160 de solliciter l’information si elle lui paraît nécessaire. 236 00:14:53,720 --> 00:14:57,040 Une question se pose à cet égard depuis quelque temps déjà : 237 00:14:57,240 --> 00:15:01,370 Ne faut-il pas aller plus loin dans ce renversement de la vapeur, 238 00:15:01,570 --> 00:15:05,060 selon la formule d’un auteur, et considérer finalement qu’il 239 00:15:05,260 --> 00:15:09,890 doit d’abord appartenir à l’acheteur de se renseigner lui-même à propos 240 00:15:10,090 --> 00:15:12,290 de la chose qu’il achète, comme on le considérait 241 00:15:12,490 --> 00:15:13,250 traditionnellement ? 242 00:15:14,150 --> 00:15:18,470 Sur cette question, le droit anglais privilégie une règle bien connue 243 00:15:18,670 --> 00:15:20,090 que l’on énonce en latin : emptor debet esse curiosus, 244 00:15:20,290 --> 00:15:26,150 l’acheteur doit se montrer curieux. 245 00:15:26,350 --> 00:15:29,990 C’est à lui de solliciter l’information, et même de se renseigner 246 00:15:30,190 --> 00:15:30,950 dans certains cas. 247 00:15:31,940 --> 00:15:37,070 Le droit français, depuis le milieu des années 1990, n’est pas insensible 248 00:15:37,270 --> 00:15:42,800 à cette idée, notamment quand il décide de faire dépendre l’obligation 249 00:15:43,000 --> 00:15:46,730 d’information d’un véritable déséquilibre des connaissances 250 00:15:46,940 --> 00:15:47,780 entre les parties. 251 00:15:48,860 --> 00:15:52,070 Tout comme il n’y a pas de garantie des vices cachés lorsque le vice 252 00:15:52,270 --> 00:15:56,210 invoqué est apparent, il ne devrait pas y avoir d’obligation 253 00:15:56,410 --> 00:15:59,660 d’information lorsque le défaut de connaissance de l’acheteur est 254 00:15:59,860 --> 00:16:00,620 fautif. 255 00:16:00,820 --> 00:16:05,330 C’est ainsi l’exigence de bonne foi qui doit ici guider les solutions.