1 00:00:05,100 --> 00:00:05,900 c. 2 00:00:06,520 --> 00:00:07,280 La transparence. 3 00:00:08,260 --> 00:00:11,880 Le fonctionnement de l’administration est longtemps resté mystérieux 4 00:00:12,080 --> 00:00:14,780 pour les administrés, obscur, secret. 5 00:00:16,120 --> 00:00:19,340 Trois lois cependant, de la fin des années 1970, 6 00:00:19,580 --> 00:00:23,620 ont largement remis en cause cette culture du secret dans les services 7 00:00:23,820 --> 00:00:24,580 publics. 8 00:00:24,780 --> 00:00:29,740 Je vais évoquer ces trois lois qui portent sur la transparence 9 00:00:29,940 --> 00:00:30,700 des services publics. 10 00:00:31,480 --> 00:00:36,360 Premièrement, la loi du 6 janvier 1978, Informatique et Liberté. 11 00:00:37,440 --> 00:00:41,160 Cette loi encadre la collecte de données personnelles et la création 12 00:00:41,360 --> 00:00:45,900 de fichiers, notamment par les administrations. 13 00:00:46,100 --> 00:00:47,080 Elle donne plusieurs droits. 14 00:00:47,760 --> 00:00:52,240 Droit d’accès aux données collectées sur sa propre personne. 15 00:00:52,560 --> 00:00:54,780 Évidemment, on ne peut pas accéder aux données qui ont été collectées 16 00:00:54,980 --> 00:00:56,480 sur une autre personne que soi-même. 17 00:00:57,260 --> 00:01:00,780 Droit ensuite de rectifier les informations qui ont été collectées 18 00:01:00,980 --> 00:01:01,800 sur sa propre personne. 19 00:01:02,000 --> 00:01:05,920 Droit aussi de s’opposer dans certains cas, évidemment ce droit est 20 00:01:06,120 --> 00:01:09,880 particulièrement restreint, droit de s’opposer à la collecte 21 00:01:10,080 --> 00:01:10,840 de certaines données. 22 00:01:11,880 --> 00:01:13,800 Cette loi est d’application générale. 23 00:01:14,000 --> 00:01:16,660 Elle concerne le secteur privé, mais elle concerne aussi, 24 00:01:16,860 --> 00:01:19,940 pour ce qui nous intéresse, le secteur public. 25 00:01:20,500 --> 00:01:25,060 Qu’il s’agisse des personnes publiques chargées des missions de service 26 00:01:25,260 --> 00:01:28,800 public ou des personnes privées qui sont chargées de missions de 27 00:01:29,000 --> 00:01:32,860 service public, encore une fois, qu’il s’agisse d’un SPA ou d’un SPIC. 28 00:01:35,050 --> 00:01:39,430 À ce titre, pour ce qui nous concerne, le service public, il faut signaler 29 00:01:39,630 --> 00:01:43,590 que la loi informatique et liberté a été adoptée justement à la suite 30 00:01:43,790 --> 00:01:47,330 d’un scandale sur la collecte de données par des administrations. 31 00:01:47,590 --> 00:01:52,490 En l’espèce, la loi informatique et liberté a été adoptée à la suite 32 00:01:52,690 --> 00:01:57,530 de la révélation, en 1974, d’un projet de fichiers informatiques 33 00:01:57,730 --> 00:02:04,770 de l’INSEE qui allait recouper diverses listes de données personnelles 34 00:02:04,970 --> 00:02:05,730 sur les Français. 35 00:02:05,950 --> 00:02:12,310 C’est un projet Safari qui finalement n’a pas été mis en place et qui 36 00:02:12,510 --> 00:02:17,850 a entraîné la réaction inverse, c’est-à-dire la possibilité de 37 00:02:18,050 --> 00:02:22,270 revendiquer certains droits vis-à-vis de la collecte de données personnelles. 38 00:02:22,630 --> 00:02:26,590 La loi informatique et liberté a entraîné la création d’une AAI, 39 00:02:26,790 --> 00:02:29,990 la CNIL, Commission nationale de l’informatique et des libertés, 40 00:02:30,410 --> 00:02:34,510 qui existe toujours aujourd’hui et qui est chargée d’assurer le 41 00:02:34,710 --> 00:02:37,750 respect des dispositions de la loi, y compris par l’administration. 42 00:02:37,950 --> 00:02:40,790 C’est justement pour cette raison-là qu’il s’agit d’une autorité 43 00:02:42,430 --> 00:02:45,850 administrative indépendante vis-à-vis de l’administration qu’elle est 44 00:02:46,050 --> 00:02:47,370 chargée de contrôler, la CNIL. 45 00:02:49,030 --> 00:02:53,930 Deuxième loi qui va me servir d’exemple de ce développement de la transparence 46 00:02:54,130 --> 00:02:59,530 dans les services publics, la loi du 17 juillet 1978 d’accès 47 00:02:59,730 --> 00:03:01,270 aux documents administratifs. 48 00:03:01,810 --> 00:03:04,890 Cette loi est aujourd’hui codifiée aux articles L. 49 00:03:05,090 --> 00:03:09,890 300-1 et suivants du CRPA, loi qui consacre le droit des 50 00:03:10,090 --> 00:03:14,490 administrés à la communication des documents administratifs qui 51 00:03:14,690 --> 00:03:15,810 les concernent évidemment. 52 00:03:16,690 --> 00:03:19,350 La notion de document administratif est très large. 53 00:03:19,990 --> 00:03:23,130 Il peut s’agir de tout document, quels que soient sa date, 54 00:03:23,810 --> 00:03:28,430 sa forme, son support, produit ou reçu par une administration, 55 00:03:28,630 --> 00:03:32,090 qu’il s’agisse de l’État, des collectivités territoriales, 56 00:03:32,290 --> 00:03:37,370 de toute autre personne de droit public ou par toute autre personne 57 00:03:37,570 --> 00:03:41,310 de droit privé qui serait chargée d’une mission de service public. 58 00:03:42,870 --> 00:03:47,430 Il peut s’agir de documents quelle que soit leur forme, 59 00:03:47,970 --> 00:03:50,990 dossier, rapports, études, compte rendu, procès-verbaux, 60 00:03:51,590 --> 00:03:54,970 statistiques, instructions, circulaires, notes, réponses 61 00:03:55,170 --> 00:03:59,090 ministérielles, correspondances, avis, prévisions, codes, 62 00:03:59,310 --> 00:04:00,130 sources, etc. 63 00:04:01,290 --> 00:04:05,290 Les administrés peuvent non seulement accéder aux documents qui les 64 00:04:05,490 --> 00:04:09,170 concernent, mais ils peuvent aussi demander que leurs observations 65 00:04:09,370 --> 00:04:12,590 soient consignées dans ces documents. 66 00:04:12,950 --> 00:04:15,300 C’est l’article L. 67 00:04:15,500 --> 00:04:17,050 311-3 du CRPA. 68 00:04:18,130 --> 00:04:22,950 Bien évidemment, malgré ce principe de transparence qui apparaît depuis 69 00:04:23,150 --> 00:04:29,570 la fin des années 70, il y a des limites à cette 70 00:04:29,770 --> 00:04:30,530 transparence. 71 00:04:30,750 --> 00:04:34,350 Il y a des limites en particulier à la communication des documents 72 00:04:34,550 --> 00:04:35,310 administratifs. 73 00:04:35,750 --> 00:04:39,230 Le secret est encore admis dans le fonctionnement de certaines 74 00:04:39,430 --> 00:04:45,650 administrations, par exemple le secret-défense, le secret lié à 75 00:04:45,850 --> 00:04:50,070 la poursuite des relations extérieures, les secrets liés à la sûreté de l’État, 76 00:04:50,370 --> 00:04:51,130 etc. 77 00:04:51,330 --> 00:04:56,030 Tous ces secrets légitimes peuvent être invoqués par l’État pour refuser 78 00:04:56,230 --> 00:04:57,610 la transmission de certains documents. 79 00:04:58,610 --> 00:05:02,170 Lorsque l’administration refuse la communication d’un document, 80 00:05:02,610 --> 00:05:05,070 il faut qu’il y ait une sanction, il faut qu’il y ait une garantie 81 00:05:07,830 --> 00:05:12,490 qui permet de s’assurer que l’administration transmettra bien 82 00:05:12,690 --> 00:05:14,970 le document à l’administré qui le demande. 83 00:05:15,690 --> 00:05:20,950 Il y a donc un système qui garantit la transmission des documents aux 84 00:05:21,150 --> 00:05:22,230 personnes concernées. 85 00:05:22,430 --> 00:05:26,410 Un administré qui n’obtient pas la transmission d’un document peut 86 00:05:26,610 --> 00:05:29,030 saisir la commission d’accès aux documents administratifs, 87 00:05:29,770 --> 00:05:33,290 la CADA, qui est une autorité administrative indépendante. 88 00:05:34,370 --> 00:05:39,450 La CADA rend un avis sur la communication du document qui est 89 00:05:39,650 --> 00:05:40,470 demandé par l’administré. 90 00:05:41,610 --> 00:05:45,290 L’administration ensuite est libre de suivre cet avis, favorable, 91 00:05:45,750 --> 00:05:48,930 réservé ou défavorable à la transmission du document. 92 00:05:49,950 --> 00:05:53,330 L’avis de la CADA n’est pas un avis obligatoire. 93 00:05:55,150 --> 00:06:00,150 L’administré peut ensuite saisir le juge administratif. 94 00:06:00,550 --> 00:06:06,110 Il peut demander au juge administratif d’annuler le refus de transmettre 95 00:06:06,310 --> 00:06:07,070 un document. 96 00:06:07,650 --> 00:06:15,470 Il peut demander au juge administratif d’ordonner à l’administration la 97 00:06:15,670 --> 00:06:18,730 transmission du document, éventuellement sous astreinte. 98 00:06:18,930 --> 00:06:22,110 C’est une injonction dont j’ai déjà parlé dans ce cours, 99 00:06:22,490 --> 00:06:24,890 une injonction assortie d’une demande d’astreinte. 100 00:06:26,470 --> 00:06:30,250 Le juge administratif d’ailleurs suit souvent l’avis de la CADA. 101 00:06:30,670 --> 00:06:35,650 Si la CADA a rendu un avis favorable à la transmission du document, 102 00:06:36,210 --> 00:06:41,090 il y a de fortes chances pour que le juge administratif ordonne à 103 00:06:41,290 --> 00:06:44,470 l’administration de transmettre le document qu’elle a refusé de 104 00:06:44,670 --> 00:06:45,430 transmettre. 105 00:06:46,310 --> 00:06:49,630 Pour vous signaler la chose, j’en ai d’ailleurs déjà parlé, 106 00:06:50,410 --> 00:06:53,210 c’est exactement ce qui s’était produit dans l’arrêt APREI. 107 00:06:53,410 --> 00:06:55,170 En tout cas, c’est ce qui était demandé au juge. 108 00:06:55,370 --> 00:06:58,490 Il était demandé au juge que celui-ci ordonne à l’administration, 109 00:07:00,270 --> 00:07:03,830 ce que le requérant considérait comme une administration, 110 00:07:05,110 --> 00:07:08,790 demandait donc au juge d’ordonner à l’administration de transmettre 111 00:07:08,990 --> 00:07:16,170 des documents, ici des documents concernant des agents d’un centre 112 00:07:16,370 --> 00:07:17,130 d’aide par le travail. 113 00:07:17,330 --> 00:07:20,310 Je vous rappelle qu’ici, le Conseil d’État a jugé que les 114 00:07:20,510 --> 00:07:22,550 centres d’aide par le travail ne sont pas chargés d’une mission 115 00:07:22,750 --> 00:07:28,870 de service public, donc les documents dont la transmission était demandée 116 00:07:29,070 --> 00:07:31,430 n’étaient pas des documents administratifs qui relevaient du 117 00:07:31,630 --> 00:07:32,930 juge administratif. 118 00:07:35,580 --> 00:07:39,480 Enfin, troisième loi que je voudrais évoquer dans cette vidéo, 119 00:07:39,960 --> 00:07:45,740 la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes 120 00:07:45,940 --> 00:07:51,380 administratifs, encore une loi qui assure la transparence du 121 00:07:51,580 --> 00:07:52,600 fonctionnement des services publics. 122 00:07:52,800 --> 00:07:56,500 Cette loi est aujourd’hui codifiée aux articles L. 123 00:07:56,700 --> 00:08:02,400 211-1 et suivant du Code des relations entre le public et l’administration. 124 00:08:03,480 --> 00:08:08,340 Cet article prévoit que les usagers des services publics – encore une 125 00:08:08,540 --> 00:08:10,720 fois  que le service public soit géré par une personne publique 126 00:08:10,920 --> 00:08:13,660 ou par une personne privée, qu’il s’agisse d’un SPA ou d’un SPIC –, 127 00:08:14,640 --> 00:08:20,680 ont le droit d’être informés sans délai des motifs des décisions 128 00:08:20,880 --> 00:08:23,260 administratives individuelles défavorables qui les concernent. 129 00:08:24,400 --> 00:08:29,240 Vous le voyez, le droit à la motivation des actes administratifs n’est 130 00:08:29,440 --> 00:08:30,200 pas général. 131 00:08:30,540 --> 00:08:33,660 Il vaut seulement pour les décisions individuelles qui sont défavorables 132 00:08:35,000 --> 00:08:35,960 aux administrés. 133 00:08:36,400 --> 00:08:38,410 L’article L. 134 00:08:38,610 --> 00:08:44,180 211-2 du CRPA fixe une liste des décisions concernées par cette 135 00:08:44,380 --> 00:08:45,360 obligation de motivation. 136 00:08:45,840 --> 00:08:48,460 Ce sont les mesures individuelles de police, les sanctions, 137 00:08:49,060 --> 00:08:51,840 les refus d’autorisation, les retraits d’avantage, 138 00:08:52,220 --> 00:08:54,180 les refus d’avantage, etc. 139 00:08:55,540 --> 00:09:00,280 Les décisions défavorables que prennent les personnes chargées 140 00:09:00,480 --> 00:09:04,040 d’une mission de service public qui ne sont pas accompagnées des 141 00:09:04,240 --> 00:09:07,220 motifs sur lesquels elles reposent sont illégales. 142 00:09:07,820 --> 00:09:12,580 Le juge peut être amené à les annuler en cas de recours. 143 00:09:13,520 --> 00:09:16,680 La motivation des actes, qui sont pris par les personnes 144 00:09:16,880 --> 00:09:21,200 gestionnaires de services publics, permet aux administrés de comprendre, 145 00:09:21,400 --> 00:09:26,020 voire d’accepter, les décisions qui sont prises à leur encontre. 146 00:09:26,220 --> 00:09:31,120 Cette motivation permet également de contester les décisions devant 147 00:09:31,320 --> 00:09:32,080 le juge administratif. 148 00:09:32,780 --> 00:09:36,820 Un administré qui est informé des raisons pour lesquelles une décision 149 00:09:37,020 --> 00:09:43,660 a été prise peut prendre conscience du caractère erroné de cette décision. 150 00:09:45,300 --> 00:09:49,300 En outre, la motivation peut permettre au gestionnaire du service public 151 00:09:49,500 --> 00:09:51,600 de prendre la meilleure décision. 152 00:09:52,120 --> 00:09:57,800 En étant obligé de formuler les motifs pour lesquels telle décision 153 00:09:58,000 --> 00:10:02,360 est prise, le gestionnaire du service public doit réfléchir mûrement 154 00:10:02,560 --> 00:10:03,340 à sa décision. 155 00:10:05,140 --> 00:10:11,860 Bref, ces trois lois ont largement contribué à instaurer une gestion 156 00:10:12,060 --> 00:10:15,500 plus transparente des services publics, mais aussi à instaurer une forme 157 00:10:15,700 --> 00:10:19,180 de démocratie administrative, démocratie administrative sur laquelle 158 00:10:19,380 --> 00:10:21,280 je reviendrai plus tard dans ce cours.