1 00:00:05,650 --> 00:00:08,830 Le troisième point que nous allons voir maintenant dans les effets 2 00:00:09,030 --> 00:00:12,760 du contrat entre les parties, c'est un point qui est lié à 3 00:00:12,960 --> 00:00:17,860 l'obligation de bonne foi qu'on vient de voir et qui concerne ce 4 00:00:18,060 --> 00:00:20,140 qu'on peut appeler les suites du contrat. 5 00:00:20,810 --> 00:00:25,960 Alors les suites de contrats, ça correspond à la découverte par 6 00:00:26,160 --> 00:00:30,760 le juge de certaines obligations, certaines obligations qu'il a insérées 7 00:00:30,960 --> 00:00:35,530 dans les contrats, alors même que les parties ne les avaient pas prévues. 8 00:00:37,050 --> 00:00:41,950 Alors ce principe de forçage du contrat, selon le mot d'un auteur 9 00:00:42,150 --> 00:00:45,310 qui était Josserand, Josserand a parlé du forçage du 10 00:00:45,510 --> 00:00:50,410 contrat sur cette découverte d'obligation par le juge. 11 00:00:51,130 --> 00:00:55,870 Il trouvait son fondement avant la réforme de 2016 dans l'article 12 00:00:56,070 --> 00:01:01,780 1135 du Code civil, on le retrouve, on retrouve le même texte aujourd'hui 13 00:01:01,980 --> 00:01:07,480 dans l'article 1194 du Code civil, qui dispose que les contrats obligent 14 00:01:07,680 --> 00:01:11,890 non seulement à ce qui est exprimé, mais encore à toutes les suites 15 00:01:12,090 --> 00:01:15,760 que leur donne l'équité, l'usage ou la loi. 16 00:01:16,760 --> 00:01:20,830 Alors ça veut dire qu'en dehors des clauses mêmes qui ont été rédigées, 17 00:01:21,030 --> 00:01:26,620 qui ont été prévues par le contrat, le contenu obligatoire peut s'étendre 18 00:01:27,160 --> 00:01:30,310 à des obligations qui, tout simplement, n'ont pas été 19 00:01:30,510 --> 00:01:34,240 envisagées par les parties et qui vont compléter le contrat. 20 00:01:35,380 --> 00:01:39,610 Alors c'est d'abord, évidemment, la loi qui vient compléter 21 00:01:39,810 --> 00:01:42,280 les obligations prévues par les parties. 22 00:01:43,510 --> 00:01:47,320 Dans les lois qui viennent compléter le contrat, on peut faire la 23 00:01:47,520 --> 00:01:50,440 distinction entre deux types de lois que vous avez vus, 24 00:01:51,400 --> 00:01:54,370 distinction que vous avez sûrement étudiée en première année, 25 00:01:54,570 --> 00:01:58,240 la distinction entre les lois supplétives de volonté et les lois 26 00:01:58,440 --> 00:01:59,200 impératives. 27 00:01:59,890 --> 00:02:02,650 La loi impérative, c'est la loi qui s'impose aux parties, 28 00:02:03,040 --> 00:02:05,830 la loi d'ordre public qu'elles ne peuvent écarter. 29 00:02:06,430 --> 00:02:10,540 Et donc, évidemment, les dispositions impératives qui 30 00:02:10,740 --> 00:02:14,620 figurent dans une loi s'imposent aux parties lorsque leur contrat 31 00:02:15,010 --> 00:02:19,570 figure dans le domaine prévu par le législateur, alors même qu'elles 32 00:02:19,770 --> 00:02:20,530 ne l'ont pas prévu. 33 00:02:20,730 --> 00:02:25,300 La loi impérative s'impose à tous et la loi impérative va remplacer 34 00:02:25,500 --> 00:02:29,290 éventuellement des clauses qui seraient contraires à cette notion 35 00:02:29,490 --> 00:02:32,350 d'ordre public, on avait vu que le contrat doit être conforme à 36 00:02:32,550 --> 00:02:36,280 l'ordre public donc ici, si le contrat contredit une loi 37 00:02:36,480 --> 00:02:39,340 impérative, les dispositions, les stipulations contractuelles 38 00:02:39,700 --> 00:02:42,850 s'écartent au profit des dispositions légales. 39 00:02:43,780 --> 00:02:48,010 Mais aussi, évidemment, on doit tenir compte des lois, 40 00:02:48,210 --> 00:02:52,720 cette fois-ci supplétives de volonté, les lois supplétives de volonté 41 00:02:52,920 --> 00:02:57,730 qui s'appliquent, à défaut d'avoir été écartées expressément par les 42 00:02:57,930 --> 00:03:02,770 parties, c'est-à-dire qu'alors, il faut qualifier le contrat et 43 00:03:02,970 --> 00:03:07,120 quand on est dans un contrat dit nommé, eh bien ça veut dire que les 44 00:03:07,320 --> 00:03:11,680 dispositions légales prévues comme applicables à ce type d'opération 45 00:03:11,880 --> 00:03:13,900 contractuelle, à ce contrat qui est nommé, c'est-à-dire qu'il est 46 00:03:14,230 --> 00:03:17,200 réglementé dans la loi, vont là aussi s'appliquer, 47 00:03:17,400 --> 00:03:21,670 sauf si les parties ont décidé expressément d'écarter, 48 00:03:22,450 --> 00:03:24,940 de mettre à l'écart ces dispositions. 49 00:03:25,140 --> 00:03:29,470 Donc premier complément du contrat, premières suites du contrat qui 50 00:03:29,670 --> 00:03:33,040 vont s'imposer alors même qu'elles n'ont pas été prévues par les parties, 51 00:03:33,340 --> 00:03:36,460 les suites légales, qu'il s'agisse de lois impératives qui vont 52 00:03:36,660 --> 00:03:40,150 automatiquement s'appliquer ou de loi supplétives de volontés 53 00:03:40,480 --> 00:03:44,380 qui vont s'appliquer si elles n'ont pas été écartées par les parties. 54 00:03:45,400 --> 00:03:49,870 Le texte renvoie également, donc le texte de l'article 1194, 55 00:03:50,410 --> 00:03:52,100 renvoie également aux usages. 56 00:03:52,300 --> 00:03:55,690 Alors les usages, je ne reviens pas sur les usages comme sources 57 00:03:55,890 --> 00:03:56,650 de droit. 58 00:03:56,850 --> 00:04:00,250 Vous savez, vous avez vu dans les sources de droit que l'usage est 59 00:04:00,450 --> 00:04:04,060 une source, même si c'est une source secondaire aujourd'hui mais il 60 00:04:04,260 --> 00:04:07,000 y a des domaines dans lesquels l'usage est une véritable source 61 00:04:07,200 --> 00:04:09,970 importante, notamment en matière commerciale. 62 00:04:10,990 --> 00:04:14,200 On va considérer que les usages dans un domaine particulier, 63 00:04:14,400 --> 00:04:17,320 dans une profession déterminée où les usages régionaux, 64 00:04:17,520 --> 00:04:22,480 les usages locaux vont s'incorporer au contrat alors même qu'ils n'auraient 65 00:04:22,680 --> 00:04:28,090 pas été repris expressément par les parties, et ceci à une condition 66 00:04:28,290 --> 00:04:31,150 qui est posée par la Cour de cassation, c'est-à-dire que les deux parties 67 00:04:31,350 --> 00:04:35,050 doivent connaître l'existence de cet usage, et à ce moment-là, 68 00:04:35,250 --> 00:04:39,340 on va considérer qu'effectivement, même si elles ne l'ont pas repris 69 00:04:39,540 --> 00:04:43,510 expressément, les usages vont s'incorporer au contrat, 70 00:04:43,710 --> 00:04:46,780 en faire partie aux côtés des prévisions contractuelles, 71 00:04:46,980 --> 00:04:48,760 aux côtés des stipulations contractuelles. 72 00:04:49,510 --> 00:04:52,780 Et puis il y a un dernier, un troisième et dernier élément 73 00:04:53,260 --> 00:04:57,640 auquel il est fait référence dans l'article 1194, c'est l'équité. 74 00:04:58,510 --> 00:05:00,840 Alors l'équité n'est pas source de droit, en principe, 75 00:05:01,040 --> 00:05:03,780 l'équité, le sentiment de justice que peut avoir le juge n'est pas 76 00:05:03,980 --> 00:05:06,000 une source de droit, parce qu'effectivement, 77 00:05:06,200 --> 00:05:08,320 l'équité est source d'insécurité juridique. 78 00:05:08,520 --> 00:05:14,160 Chacun peut avoir un propre sentiment, son propre sentiment de ce qui 79 00:05:14,360 --> 00:05:17,760 est juste, de ce qu'est l'équité, de ce à quoi renvoie l'équité et 80 00:05:17,960 --> 00:05:21,450 donc on sait l'adage fameux "Dieu nous préserve de l'équité des 81 00:05:21,650 --> 00:05:22,410 Parlements". 82 00:05:22,860 --> 00:05:25,110 L'équité n'est pas une source de droit en droit français. 83 00:05:25,310 --> 00:05:29,130 Néanmoins, là, dans ce texte, on a une référence à cette idée. 84 00:05:29,330 --> 00:05:32,430 D'autres références figurent à d'autres textes du Code civil, 85 00:05:32,630 --> 00:05:36,240 mais en droit des contrats, on a ici une référence à l'équité. 86 00:05:37,680 --> 00:05:40,800 Sur le fondement, à la fois parfois de la bonne foi, mais parfois de 87 00:05:41,000 --> 00:05:45,420 l'ancien article 1135, aujourd'hui article 1194 et sur 88 00:05:45,620 --> 00:05:50,100 l'idée qu'on peut avoir de l'équité, le juge s'est reconnu lui-même 89 00:05:50,310 --> 00:05:53,790 donc en dehors d'une référence à un usage ou en dehors d'une référence 90 00:05:53,990 --> 00:05:56,230 à une loi, un pouvoir créateur. 91 00:05:56,430 --> 00:06:00,570 Et c'est ça véritablement que Josserand appelait le forçage du contrat, 92 00:06:00,770 --> 00:06:03,180 c'est-à-dire un pouvoir créateur du juge. 93 00:06:03,380 --> 00:06:06,270 Le juge va créer des obligations nouvelles alors même qu'elles n'ont 94 00:06:06,470 --> 00:06:07,890 jamais été envisagées par les parties. 95 00:06:08,670 --> 00:06:12,330 De ce pouvoir créateur du juge, il y a deux manifestations qu'on 96 00:06:12,530 --> 00:06:15,190 va retrouver principalement en droit positif. 97 00:06:15,390 --> 00:06:19,890 La première, c'est la découverte par le juge de l'obligation de 98 00:06:20,090 --> 00:06:20,850 sécurité. 99 00:06:21,060 --> 00:06:25,440 Et la deuxième, c'est la découverte, puis le développement des obligations 100 00:06:25,640 --> 00:06:27,510 de conseil, d'information, de mise en garde, etc. 101 00:06:29,100 --> 00:06:32,430 Première obligation : l'obligation de sécurité. 102 00:06:32,630 --> 00:06:35,580 L'obligation de sécurité, dans le contrat de transport à 103 00:06:35,780 --> 00:06:40,770 l'origine, a été découverte par la Cour de cassation dans un arrêt 104 00:06:40,970 --> 00:06:44,550 de la Chambre civile du 21 novembre 1911. 105 00:06:47,490 --> 00:06:50,010 Donc à l'origine, on vise les contrats de transport. 106 00:06:50,820 --> 00:06:55,260 Il s'agit de favoriser l'indemnisation des dommages subis par les victimes. 107 00:06:55,560 --> 00:06:58,830 Donc on va créer une obligation contractuelle de sécurité pour 108 00:06:59,030 --> 00:07:03,390 permettre aux victimes d'être indemnisées lors de ce genre 109 00:07:03,810 --> 00:07:04,570 d'accident. 110 00:07:05,970 --> 00:07:10,020 D'après l'arrêt de 1911, l'exécution du contrat de transport 111 00:07:10,220 --> 00:07:14,550 comporte pour le transporteur l'obligation de conduire le voyageur 112 00:07:14,910 --> 00:07:16,710 sain et sauf à destination. 113 00:07:16,910 --> 00:07:24,120 À partir de cette jurisprudence de 1911, la Cour de cassation n'a pas cessé 114 00:07:24,320 --> 00:07:28,530 d'étendre le domaine de l'obligation contractuelle de sécurité. 115 00:07:28,920 --> 00:07:31,620 On la retrouve aujourd'hui dans de très nombreux contrats dans 116 00:07:31,820 --> 00:07:35,010 les domaines dans lesquels la sécurité de la personne est en jeu, 117 00:07:35,210 --> 00:07:37,800 donc dans tous les contrats de transport, et ça vaut tous les 118 00:07:38,000 --> 00:07:42,210 moyens de transport, même par exemple, le télésiège, le téléski sont des 119 00:07:42,410 --> 00:07:45,240 contrats de transport dans lesquels il va y avoir une obligation de 120 00:07:45,440 --> 00:07:49,080 sécurité, mais aussi des contrats qui mettent en cause une pratique 121 00:07:49,280 --> 00:07:53,850 sportive donc avec un danger pour l'intégrité physique de la personne, 122 00:07:54,750 --> 00:07:57,690 on va avoir donc, même dans le contrat de travail, le développement 123 00:07:57,890 --> 00:08:01,320 de l'obligation de sécurité à la charge de l'employeur qui a donné 124 00:08:01,520 --> 00:08:04,800 lieu à des jurisprudences sur lesquelles je reviendrai au deuxième 125 00:08:05,000 --> 00:08:08,340 semestre quand on verra le domaine des accidents du travail ou des 126 00:08:08,540 --> 00:08:09,330 maladies professionnelles. 127 00:08:09,630 --> 00:08:15,450 Donc on a cette obligation qui va être créée par le juge directement 128 00:08:15,650 --> 00:08:17,700 parce que dans les contrats de transport, il n'y avait rien sur 129 00:08:17,900 --> 00:08:21,750 l'obligation de sécurité, le juge va créer et greffer cette 130 00:08:22,380 --> 00:08:24,150 obligation sur tous les contrats de transport. 131 00:08:25,110 --> 00:08:29,880 De la même façon, une obligation d'information a été créée dans 132 00:08:30,080 --> 00:08:30,840 les contrats. 133 00:08:31,040 --> 00:08:33,300 Alors souvenez-vous, on avait vu l'obligation d'information 134 00:08:33,500 --> 00:08:36,990 qui existe dans la période de négociation, c'est-à-dire l'obligation 135 00:08:37,190 --> 00:08:38,040 précontractuelle d'information. 136 00:08:38,240 --> 00:08:43,320 Ici, on parle d'une obligation contractuelle, c'est-à-dire pendant 137 00:08:43,520 --> 00:08:47,250 l'exécution du contrat, mais qui recoupe à peu près les 138 00:08:47,450 --> 00:08:50,880 mêmes critères, le même régime que celui qu'on avait vu pour 139 00:08:51,080 --> 00:08:54,510 l'obligation précontractuelle, notamment sur la question de la preuve, 140 00:08:55,440 --> 00:08:58,170 et alors ce qui est intéressant, c'est que cette obligation 141 00:08:58,370 --> 00:09:01,830 d'information, elle trouve certaines déclinaisons, elle devient plus 142 00:09:02,030 --> 00:09:05,550 ou moins importante selon le domaine dans lequel on se trouve, 143 00:09:05,750 --> 00:09:08,220 c'est-à-dire que l'obligation d'information, on peut estimer 144 00:09:08,420 --> 00:09:11,480 que c'est une obligation assez objective, le minimum qui est dû 145 00:09:11,790 --> 00:09:13,620 pour que le contrat puisse être exécuté. 146 00:09:15,000 --> 00:09:18,780 Elle peut se traduire en une obligation plus subjective qui est une véritable 147 00:09:18,980 --> 00:09:22,620 obligation de conseil adapté à la personne du contractant. 148 00:09:23,130 --> 00:09:28,500 Et ça peut aller jusqu'à l'obligation de mise en garde qui pèse sur certains 149 00:09:28,700 --> 00:09:32,250 professionnels, par exemple, qui a été mise à la charge du banquier 150 00:09:32,450 --> 00:09:36,060 par la Cour de cassation avec une limite dans ses obligations 151 00:09:36,420 --> 00:09:39,870 progressivement d'information, de conseil et de mise en garde, 152 00:09:40,070 --> 00:09:43,680 c'est-à-dire que pour le banquier, la Cour de cassation a précisé 153 00:09:43,880 --> 00:09:48,360 que le banquier n'avait pas de devoir d'immixtion, il avait plutôt 154 00:09:48,560 --> 00:09:51,570 un devoir de non immixtion dans les affaires de son client, 155 00:09:51,770 --> 00:09:54,810 si le client, malgré la mise en garde, veut faire une opération, 156 00:09:55,170 --> 00:09:57,870 le banquier ne pourrait pas s'y opposer, si évidemment, 157 00:09:58,200 --> 00:09:59,700 les conditions légales sont réunies. 158 00:10:00,710 --> 00:10:03,920 Donc cette obligation d'information, de conseil, de mise en garde, 159 00:10:04,370 --> 00:10:08,990 elle vaut pour de nombreux professionnels, pour le médecin aussi, 160 00:10:09,410 --> 00:10:10,700 pour le notaire, pour l'avocat. 161 00:10:10,900 --> 00:10:14,540 Parfois, c'est une obligation d'ailleurs qui a été reprise dans 162 00:10:14,740 --> 00:10:16,950 la loi, notamment pour le médecin. 163 00:10:17,150 --> 00:10:20,060 Là aussi, c'est un point sur lequel je reviendrai quand on verra la 164 00:10:20,260 --> 00:10:24,020 responsabilité médicale, puisque dans la loi du 4 mars 2002 165 00:10:24,220 --> 00:10:28,490 sur le droit des malades, on a repris l'obligation d'information 166 00:10:28,690 --> 00:10:31,340 telle qu'elle avait été développée par la jurisprudence. 167 00:10:31,770 --> 00:10:35,240 Alors ce qui est important, c'est que dans ces deux grandes 168 00:10:35,440 --> 00:10:39,350 catégories d'obligations, sécurité et information au sens large, 169 00:10:40,010 --> 00:10:44,660 le juge ne se repose plus sur la volonté des parties pour en déduire 170 00:10:45,080 --> 00:10:46,460 l'existence d'obligations. 171 00:10:47,450 --> 00:10:50,480 Alors ce pouvoir créateur, on reviendra sur l'obligation de 172 00:10:50,680 --> 00:10:54,650 sécurité un peu quand on verra aussi la responsabilité contractuelle 173 00:10:54,850 --> 00:10:59,300 parce qu' à propos de cette obligation de sécurité, le juge a précisé 174 00:10:59,500 --> 00:11:01,560 le domaine des obligations de moyens et de résultats, souvenez-vous, 175 00:11:02,030 --> 00:11:06,560 c'est une distinction qu'on avait vue au tout début de ce semestre 176 00:11:06,760 --> 00:11:07,820 sur le droit des obligations. 177 00:11:08,020 --> 00:11:10,100 Alors, ce qui est important, je disais, c'est que, 178 00:11:10,730 --> 00:11:14,980 à partir de ce pouvoir créateur du juge, on peut maintenant faire un peu 179 00:11:15,180 --> 00:11:19,100 une synthèse sur les pouvoirs du juge face au contrat, 180 00:11:19,400 --> 00:11:23,600 dans ses effets qu'il va produire entre les parties. 181 00:11:23,800 --> 00:11:28,670 L'idée, c'est qu'au départ, le juge n'est pas partie au contrat, 182 00:11:28,870 --> 00:11:32,750 donc le juge est finalement une sorte de tiers neutre, 183 00:11:32,950 --> 00:11:34,700 d'arbitre au regard du contrat. 184 00:11:35,150 --> 00:11:39,770 Il va essayer de restituer les obligations des parties pour que 185 00:11:39,970 --> 00:11:42,050 le contrat soit correctement exécuté. 186 00:11:42,250 --> 00:11:46,430 Donc à l'origine, on a un rôle finalement du juge qui est en retrait, 187 00:11:46,630 --> 00:11:50,030 le rôle classique du juge dans le contrat, c'est un rôle limité, 188 00:11:50,230 --> 00:11:54,140 un rôle neutre, le juge va interpréter le contrat. 189 00:11:54,650 --> 00:11:57,470 Et on avait vu que dans les règles sur l'interprétation du contrat, 190 00:11:58,280 --> 00:12:02,810 le juge a pour objectif normalement de restituer, de rechercher la 191 00:12:03,010 --> 00:12:04,670 volonté réelle des parties. 192 00:12:04,870 --> 00:12:08,240 Donc dans sa mission classique d'interprétation du contrat, 193 00:12:08,780 --> 00:12:11,570 le juge recherche la volonté des parties. 194 00:12:11,770 --> 00:12:14,840 Le juge est soumis à la volonté des parties, en quelque sorte, 195 00:12:15,050 --> 00:12:16,310 qu'il s'agit de restituer. 196 00:12:16,820 --> 00:12:21,800 Mais loin de se limiter finalement à cet aspect en retrait dans le 197 00:12:22,000 --> 00:12:24,410 contrat, le juge a développé sa mission. 198 00:12:24,610 --> 00:12:29,630 D'abord, même s'il faut manier évidemment cette idée avec précaution, 199 00:12:29,830 --> 00:12:33,650 le juge, parfois, s'est reconnu le droit de modifier le contrat. 200 00:12:34,220 --> 00:12:37,100 Alors le juge s'est reconnu le droit de modifier le contrat, 201 00:12:37,300 --> 00:12:39,050 même s'il y a des limites, on l'a vu notamment, 202 00:12:39,350 --> 00:12:43,600 sur la bonne foi avec l'arrêt Les maréchaux de 2007 où la Cour de 203 00:12:43,800 --> 00:12:47,270 cassation limite le pouvoir du juge, le pouvoir d'intervention du juge 204 00:12:47,470 --> 00:12:49,910 dans le contrat au nom de la bonne foi, en disant qu'on ne peut pas toucher 205 00:12:50,110 --> 00:12:55,130 au cœur du contrat, le juge, parfois, s'est reconnu de manière 206 00:12:55,330 --> 00:12:59,180 incidente le moyen d'agir sur un contrat et de modifier certaines 207 00:12:59,380 --> 00:13:03,230 des obligations, que l'on pense à ce que j'avais dit lors de l'étude 208 00:13:03,430 --> 00:13:06,740 de la nullité sur les clauses de non-concurrence excessives, 209 00:13:07,190 --> 00:13:11,750 lorsqu'une clause apparaît excessive, le juge va parfois la réduire au 210 00:13:11,950 --> 00:13:16,250 lieu d'annuler purement et simplement, la clause est illicite, 211 00:13:16,450 --> 00:13:20,270 on l'annule, le juge va la modifier pour qu'elle puisse produire ses 212 00:13:20,470 --> 00:13:21,230 effets. 213 00:13:21,430 --> 00:13:24,860 Et une des critiques qu'on pouvait à ce moment-là adresser au juge, 214 00:13:25,060 --> 00:13:29,480 c'est que l'admission de clauses excessives, l'admission de leur 215 00:13:29,680 --> 00:13:35,960 validité simplement en les réduisant, permettait à un créancier de faire 216 00:13:36,160 --> 00:13:40,400 figurer au contrat une clause naturellement excessive en se disant 217 00:13:40,940 --> 00:13:45,080 certes, ma clause est excessive, mais le juge va la réduire et ainsi, 218 00:13:45,280 --> 00:13:46,040 elle sera valable. 219 00:13:46,240 --> 00:13:49,070 Alors je m'explique et je donne un exemple pour que ce soit plus clair. 220 00:13:49,820 --> 00:13:52,190 Si une clause de non-concurrence qui doit être limitée dans le temps 221 00:13:52,390 --> 00:13:54,800 et dans l'espace est excessive dans sa durée, elle prévoit une 222 00:13:55,000 --> 00:13:59,270 durée de dix ans, si le juge l'annule au motif qu'elle est illicite, 223 00:13:59,470 --> 00:14:03,890 là, l'employeur va perdre tout intérêt de prévoir dans le contrat 224 00:14:04,090 --> 00:14:07,250 des clauses excessives parce qu'il se dit, si le juge annule, 225 00:14:07,450 --> 00:14:08,210 je perds tout. 226 00:14:08,660 --> 00:14:11,960 En revanche, avec le pouvoir correctif du juge, le pouvoir de modifier 227 00:14:12,160 --> 00:14:15,320 les obligations au contrat, là, un créancier pourrait se dire, 228 00:14:15,530 --> 00:14:19,280 j'essaie d'avoir une clause d'une durée de dix ans, je sais que le 229 00:14:19,480 --> 00:14:23,210 juge réduira et que je gagnerai au moins peut-être une clause de 230 00:14:23,410 --> 00:14:26,990 cinq ans, alors que si j'avais dû être prudent, je n'aurais pas 231 00:14:27,190 --> 00:14:28,880 osé mettre au-delà de trois ou quatre ans. 232 00:14:29,380 --> 00:14:33,680 Donc en fait, ce pouvoir de modification des obligations par 233 00:14:33,880 --> 00:14:37,340 le juge, il a été parfois critiqué par certains auteurs au motif que 234 00:14:37,540 --> 00:14:39,770 ça pouvait entraîner une certaine mauvaise foi. 235 00:14:40,100 --> 00:14:43,550 Ça pouvait justifier certains excès, certains abus, parce que le pouvoir 236 00:14:43,750 --> 00:14:48,140 correcteur du juge va valider en réduisant l'excès au lieu d'annuler 237 00:14:48,340 --> 00:14:50,990 purement et simplement quelque chose qui serait excessif. 238 00:14:51,190 --> 00:14:54,710 Donc on peut être critique sur ce pouvoir du juge, même s'il le 239 00:14:54,910 --> 00:14:58,850 fait pour que le contrat puisse en effet avoir une force obligatoire 240 00:14:59,050 --> 00:15:02,040 et puisse recevoir exécution entre les parties. 241 00:15:02,940 --> 00:15:06,120 Alors pouvoir de modification, on retrouvera ce pouvoir de 242 00:15:06,320 --> 00:15:09,960 modification au profit du juge dans le thème suivant qu'on verra 243 00:15:10,160 --> 00:15:11,830 dans une autre vidéo sur l'imprévision. 244 00:15:12,030 --> 00:15:15,780 Aujourd'hui, la loi permet au juge d'intervenir dans le contrat pour 245 00:15:15,980 --> 00:15:20,040 le réviser lorsque les circonstances économiques ont été bouleversées. 246 00:15:20,240 --> 00:15:24,510 Et puis la troisième modalité d'intervention du juge qui montre 247 00:15:24,930 --> 00:15:28,860 finalement un interventionnisme croissant, le paroxysme de 248 00:15:29,250 --> 00:15:32,220 l'intervention du juge, c'est ce qu'on vient de voir, 249 00:15:32,420 --> 00:15:34,020 c'est-à-dire le forçage du contrat. 250 00:15:34,590 --> 00:15:38,790 Lorsqu'il s'agit de forcer le contrat, c'est bien l'idée que les parties 251 00:15:38,990 --> 00:15:42,150 n'ont pas prévu des obligations qui vont être imposées par le juge. 252 00:15:42,750 --> 00:15:46,440 Le juge qui était à l'origine un tiers neutre, un arbitre dans le 253 00:15:46,640 --> 00:15:49,860 contrat qui recherchait la volonté des parties, le juge va en quelque 254 00:15:50,060 --> 00:15:54,090 sorte se substituer aux parties pour prévoir des obligations qu'elles 255 00:15:54,290 --> 00:15:55,050 n'ont pas prévues. 256 00:15:55,250 --> 00:15:57,360 Le juge va quasiment devenir une partie au contrat. 257 00:15:57,660 --> 00:16:01,560 Voilà donc ça, à travers les différents exemples qu'on a vus pour certains 258 00:16:01,760 --> 00:16:04,740 et d'autres qu'on pourra revoir par la suite, on voit que le rôle 259 00:16:04,940 --> 00:16:08,490 du juge n'est pas toujours le même et qu'il y a évidemment une 260 00:16:08,690 --> 00:16:09,810 intervention du juge dans le contrat. 261 00:16:10,010 --> 00:16:13,260 Alors on ne doit pas forcément se méfier évidemment du juge dans 262 00:16:13,460 --> 00:16:17,130 le contrat, mais on est loin de l'idée suivant laquelle le juge 263 00:16:17,330 --> 00:16:22,320 est extérieur à la volonté des parties et le juge a un rôle limité 264 00:16:22,520 --> 00:16:24,980 dans le contrat, le simple rôle de l'interprétation. 265 00:16:25,180 --> 00:16:27,780 Non, ce n'est pas vrai, le juge va parfois modifier des 266 00:16:27,980 --> 00:16:31,920 obligations, même s'il a un pouvoir limité, arrêt Les Maréchaux, 267 00:16:32,160 --> 00:16:36,450 et le juge va même parfois, au nom des suites, un terme général 268 00:16:36,650 --> 00:16:41,730 et non défini par l'article 1194, découvrir de nouvelles obligations 269 00:16:41,930 --> 00:16:44,640 d'après l'équité, alors là aussi, c'est un pouvoir formidable qui 270 00:16:44,840 --> 00:16:48,570 est donné au juge qui va pouvoir en user pour trouver de nouvelles 271 00:16:48,770 --> 00:16:50,000 obligations dans le futur. 272 00:16:50,200 --> 00:16:53,130 Pour l'instant, ça a été limité à l'obligation de sécurité et 273 00:16:53,330 --> 00:16:54,540 l'obligation d'information.