1 00:00:05,620 --> 00:00:09,670 Autre thème sur les effets du contrat entre les parties. 2 00:00:10,540 --> 00:00:15,040 C'est un thème qui va mettre justement aux prises à la fois la force 3 00:00:15,240 --> 00:00:18,430 obligatoire du contrat et l'obligation de bonne foi. 4 00:00:18,630 --> 00:00:21,400 On a vu que c'était deux principes qui se complétaient, 5 00:00:21,600 --> 00:00:26,050 mais ce sont deux principes qui peuvent parfois entrer en opposition. 6 00:00:27,100 --> 00:00:28,840 C'est la question de l'imprévision. 7 00:00:29,320 --> 00:00:32,770 L'imprévision, aujourd'hui, il y a un texte dans le Code civil, 8 00:00:32,970 --> 00:00:38,200 l'article 1195, qui détaille la procédure qui peut déboucher sur 9 00:00:38,400 --> 00:00:39,250 la révision du contrat. 10 00:00:39,910 --> 00:00:43,600 Mais ce qu'on va voir avant de voir la solution du droit positif, 11 00:00:43,800 --> 00:00:47,800 c'est qu'il y a eu un long cheminement de la jurisprudence, 12 00:00:48,000 --> 00:00:52,450 des débats importants en doctrine qui ont justement débouché, 13 00:00:52,870 --> 00:00:56,050 dans la réforme de 2016, sur l'admission dans une certaine 14 00:00:56,250 --> 00:00:58,770 mesure de la révision pour imprévision. 15 00:01:00,520 --> 00:01:05,130 Sur cette question, c'est vraiment un bouleversement qu'on a avec 16 00:01:05,440 --> 00:01:07,390 la réforme dans l'ordonnance de 2016. 17 00:01:07,990 --> 00:01:12,760 C'est un domaine, l'imprévision, sur lequel il y avait eu de nombreux 18 00:01:12,960 --> 00:01:17,050 débats qui opposaient les tenants de la force obligatoire du contrat 19 00:01:17,410 --> 00:01:21,550 aux solidaristes, ceux qui développent beaucoup l'idée de bonne foi. 20 00:01:22,090 --> 00:01:26,260 Et ce qui apparaissait à la veille de réformer le droit des contrats 21 00:01:26,460 --> 00:01:30,580 en France, c'est que finalement, notre solution de droit positif 22 00:01:31,840 --> 00:01:36,040 était un peu isolée au regard de beaucoup de systèmes étrangers, 23 00:01:36,820 --> 00:01:39,580 qui avaient progressivement reconnu la révision pour imprévision dans 24 00:01:39,780 --> 00:01:42,550 leur droit, que ce soit par la loi ou par la jurisprudence. 25 00:01:42,940 --> 00:01:46,060 Et comme on avait vu qu'un des buts de la réforme du droit des 26 00:01:46,260 --> 00:01:49,330 contrats, c'était de le rendre plus accessible et plus attractif, 27 00:01:49,630 --> 00:01:53,980 justement c'est une des illustrations ici de modernisation du droit des 28 00:01:54,180 --> 00:01:56,020 contrats sous l'influence des droits étrangers. 29 00:01:56,220 --> 00:02:02,140 D'abord, on va voir dans un premier temps le débat et la position classique 30 00:02:02,340 --> 00:02:03,460 de la Cour de cassation. 31 00:02:04,990 --> 00:02:08,560 Quand on parle du problème de la révision pour imprévision, 32 00:02:09,550 --> 00:02:11,320 d'abord il faut savoir de quoi on parle. 33 00:02:11,800 --> 00:02:15,730 On est face à un contrat qui, à l'origine, est un contrat qui 34 00:02:15,930 --> 00:02:18,070 est équilibré, donc il n'y a pas de lésion. 35 00:02:18,460 --> 00:02:21,400 La lésion, souvenez-vous, c'est un déséquilibre entre les 36 00:02:21,600 --> 00:02:25,600 prestations des parties qui va exister au moment de la formation 37 00:02:25,800 --> 00:02:26,560 du contrat. 38 00:02:26,760 --> 00:02:30,910 Ici, on a un contrat qui est équilibré au départ, mais les circonstances 39 00:02:31,110 --> 00:02:34,570 vont évoluer, les circonstances notamment économiques vont évoluer. 40 00:02:35,200 --> 00:02:39,730 Et le contrat va devenir gravement déséquilibré : en cours d'exécution, 41 00:02:40,270 --> 00:02:45,550 une des parties va se ruiner en continuant à exécuter le contrat. 42 00:02:46,630 --> 00:02:49,540 La question qui va se poser tout simplement, c'est de savoir si 43 00:02:49,900 --> 00:02:55,790 face à cette ruine annoncée d'une des parties, le juge pourrait 44 00:02:55,990 --> 00:03:01,390 intervenir dans le contrat afin de le réviser face à une évolution 45 00:03:01,590 --> 00:03:04,250 des circonstances qui était imprévisibles. 46 00:03:04,450 --> 00:03:06,940 C'est pour ça qu'on parle de révision pour imprévision. 47 00:03:07,150 --> 00:03:09,190 Le juge peut-il modifier le contrat ? 48 00:03:09,390 --> 00:03:14,020 Peut-il adapter le contrat en tenant compte des nouvelles circonstances, 49 00:03:14,220 --> 00:03:17,620 de l'évolution des circonstances qui n'avaient jamais été envisagées 50 00:03:17,820 --> 00:03:19,090 par les parties à l'origine ? 51 00:03:19,290 --> 00:03:25,720 Ici, on a un rejet de principe, une solution qui était présentée 52 00:03:25,920 --> 00:03:28,270 comme une des solutions les plus vénérables, les plus anciennes 53 00:03:28,630 --> 00:03:32,080 en matière contractuelle, c'est le fameux arrêt Canal de 54 00:03:32,280 --> 00:03:38,320 Craponne qui avait été rendu par la Cour de cassation le 6 mars 1876. 55 00:03:39,010 --> 00:03:42,700 Dans cette décision, que décide la Cour de cassation ? 56 00:03:42,970 --> 00:03:47,560 En aucun cas il n'appartient aux tribunaux, quelle qu’équitable 57 00:03:47,760 --> 00:03:51,640 que puisse leur paraître leur décision, de prendre en considération le 58 00:03:51,840 --> 00:03:56,530 temps et les circonstances pour modifier les conventions des parties 59 00:03:57,130 --> 00:04:01,360 et substituer des clauses nouvelles à celles qui ont été librement 60 00:04:01,560 --> 00:04:03,250 acceptées par les contractants. 61 00:04:04,780 --> 00:04:10,870 Cet arrêt Canal de Craponne en 1876 concernait un canal dont la 62 00:04:11,070 --> 00:04:15,550 redevance avait été fixée plusieurs siècles auparavant, avec une partie 63 00:04:15,750 --> 00:04:20,920 qui, en percevant cette redevance, se ruinait en entretenant le canal 64 00:04:21,250 --> 00:04:22,010 en question. 65 00:04:23,170 --> 00:04:26,380 Le juge reconnaît ici l'intangibilité de la convention. 66 00:04:27,010 --> 00:04:29,620 On met l'accent sur la force obligatoire du contrat. 67 00:04:30,040 --> 00:04:33,730 Même si l'autre solution, c'est-à-dire permettre au juge 68 00:04:33,930 --> 00:04:36,250 de réviser, d'adapter le contrat aux nouvelles circonstances, 69 00:04:36,670 --> 00:04:39,220 apparaît comme plus équitable, c'est impossible. 70 00:04:39,420 --> 00:04:42,460 Le juge ne peut pas modifier son appréciation. 71 00:04:42,660 --> 00:04:46,750 Il ne peut pas adapter le contrat en substituant des clauses nouvelles 72 00:04:46,950 --> 00:04:48,830 à ce qui a été convenu entre les parties. 73 00:04:49,030 --> 00:04:52,450 Donc on s'attache, à l'époque, à la notion de force obligatoire 74 00:04:52,650 --> 00:04:53,410 du contrat. 75 00:04:54,070 --> 00:04:57,490 Cette solution, qui va tenir en jurisprudence — même si, 76 00:04:57,690 --> 00:05:01,360 on le verra, il y avait eu quelques remous —, c'est une solution qui 77 00:05:01,560 --> 00:05:05,920 a été abondamment commentée, abondamment appréciée par la doctrine, 78 00:05:06,120 --> 00:05:12,220 avec un débat et des arguments pour ou contre l'admission de la 79 00:05:12,420 --> 00:05:14,350 révision pour imprévision en droit français. 80 00:05:15,130 --> 00:05:20,020 Comme argument traditionnellement opposé à la révision pour imprévision, 81 00:05:21,820 --> 00:05:25,990 on a fait valoir un argument économique qui est que l'admission de cette 82 00:05:26,190 --> 00:05:31,990 révision provoquerait, entraînerait un effet inflationniste, 83 00:05:32,190 --> 00:05:36,910 puisque la révision entraînerait l'autre révision d'autres contrats. 84 00:05:37,110 --> 00:05:40,780 C'est-à-dire que si le contrat entre A et B est révisé par le 85 00:05:40,980 --> 00:05:43,540 juge pour tenir compte de l'évolution des circonstances économiques, 86 00:05:44,020 --> 00:05:47,710 le contrat entre B et C lui-même sera révisé, entre C et D, 87 00:05:47,910 --> 00:05:52,750 etc., donc révisions en cascade qui va entraîner un effet 88 00:05:52,950 --> 00:05:53,710 inflationniste. 89 00:05:53,910 --> 00:05:55,870 Ça, c'est un argument sur le plan économique. 90 00:05:56,070 --> 00:05:59,640 Ensuite, deux arguments sur le plan strictement juridique. 91 00:05:59,840 --> 00:06:04,480 D'abord, la révision pour imprévision irait contre la force obligatoire 92 00:06:04,680 --> 00:06:09,310 du contrat, puisque les parties ont envisagé un équilibre et le 93 00:06:09,510 --> 00:06:11,130 juge ne peut pas y toucher. 94 00:06:11,330 --> 00:06:14,800 Cet équilibre voulu par les parties s'impose au juge. 95 00:06:15,220 --> 00:06:18,130 Au nom de la force obligatoire du contrat, les parties doivent 96 00:06:18,400 --> 00:06:22,990 s'en tenir à ce qu'elles ont décidé, ce qu'elles ont marqué du sceau 97 00:06:23,200 --> 00:06:26,230 de la force obligatoire dans l'engagement contractuel. 98 00:06:26,430 --> 00:06:29,980 Et puis, l'autre argument juridique qui va s'opposer à l'admission 99 00:06:30,180 --> 00:06:33,700 de la révision pour imprévision, donc qui approuve la solution Canal 100 00:06:33,900 --> 00:06:36,790 de Craponne, c'est de dire que l'admission de la révision pour 101 00:06:37,060 --> 00:06:41,200 imprévision créerait une insécurité juridique, parce que la question 102 00:06:41,400 --> 00:06:44,740 est de savoir, à ce moment-là, à partir de quel seuil on va admettre 103 00:06:44,940 --> 00:06:47,980 la révision du contrat, à partir de quand on va considérer 104 00:06:48,180 --> 00:06:51,610 qu'une partie se ruine, et que donc le juge peut intervenir 105 00:06:52,090 --> 00:06:52,850 dans le contrat. 106 00:06:53,050 --> 00:06:56,140 On avait vu que pour la lésion, il y a des seuils qui sont fixés 107 00:06:56,340 --> 00:06:59,500 par la loi, que ce soit pour la vente immobilière, que ce soit 108 00:06:59,700 --> 00:07:01,780 pour les droits d'auteurs, même si c'est discutable, 109 00:07:02,170 --> 00:07:03,730 que ce soit en matière de successions. 110 00:07:03,930 --> 00:07:07,390 Mais là, il n'y a pas de seuil, donc à partir de quand on va permettre 111 00:07:07,990 --> 00:07:10,930 l'intervention du juge, à partir de quand il pourra modifier 112 00:07:11,230 --> 00:07:12,580 les stipulations contractuelles ? 113 00:07:12,780 --> 00:07:14,800 Risque pour la sécurité juridique. 114 00:07:15,000 --> 00:07:18,430 Or, la sécurité juridique, c'est un pilier évidemment du droit 115 00:07:18,630 --> 00:07:19,390 des contrats. 116 00:07:19,590 --> 00:07:23,800 En revanche, on a d'autres arguments qui vont être mis en avant par 117 00:07:24,000 --> 00:07:26,800 d'autres membres de la doctrine, notamment, je le disais, 118 00:07:27,000 --> 00:07:27,760 les solidarises. 119 00:07:27,960 --> 00:07:29,980 C'est-à-dire qu'ils vont mettre en avant l'idée de bonne foi. 120 00:07:30,280 --> 00:07:32,850 C'est leur principal argument ici. 121 00:07:34,690 --> 00:07:37,780 La bonne foi, c'est un principe qui est aussi important que la 122 00:07:37,980 --> 00:07:38,800 force obligatoire. 123 00:07:39,310 --> 00:07:43,270 Donc la référence à la bonne foi, l'idée d'équité qui avait été 124 00:07:43,690 --> 00:07:49,120 expressément refusée dans l'arrêt de 1876, la bonne foi permet 125 00:07:49,320 --> 00:07:55,090 d'assouplir la lecture du contrat et de tenir compte d'un bouleversement 126 00:07:55,290 --> 00:07:59,380 des circonstances économiques qui n'avait jamais été prévu au moment 127 00:07:59,580 --> 00:08:00,400 de la conclusion du contrat. 128 00:08:00,880 --> 00:08:06,820 C'est cet argument qui va être lié à un autre, qui est de dire 129 00:08:07,020 --> 00:08:10,780 qu'il est faux de vouloir s'abriter derrière la force obligatoire du 130 00:08:10,980 --> 00:08:11,740 contrat. 131 00:08:11,940 --> 00:08:12,700 Pourquoi ? 132 00:08:12,900 --> 00:08:16,000 Dans la force obligatoire du contrat, on veut respecter ce que les parties 133 00:08:16,200 --> 00:08:20,290 ont prévu et ce qu'elles ont fixé comme clauses dans leur engagement. 134 00:08:20,860 --> 00:08:24,340 En revanche, dans le mécanisme de la révision pour imprévision, 135 00:08:24,540 --> 00:08:28,630 l'idée est que les parties se sont engagées au vu d'un état de chose 136 00:08:28,830 --> 00:08:32,890 existant, mais qu'elles n'ont jamais imaginé maintenir leur engagement 137 00:08:33,100 --> 00:08:37,330 si les circonstances n'avaient plus rien à voir en évoluant dans 138 00:08:37,530 --> 00:08:39,100 un contexte économique tout à fait différent. 139 00:08:39,580 --> 00:08:43,870 Pour admettre la révision pour imprévision, certains disent que, 140 00:08:44,070 --> 00:08:47,350 dans chaque contrat, il y aurait un principe qu'on retrouve 141 00:08:47,550 --> 00:08:50,500 dans les traités internationaux qui est ce qu'on appelle la clause 142 00:08:50,700 --> 00:08:53,860 rebus sic stantibus, c'est-à-dire que le traité ne vaut 143 00:08:54,060 --> 00:08:57,340 que quand les choses restent les mêmes, que quand les choses restent en l'état. 144 00:08:57,540 --> 00:09:01,450 Là, ça justifierait effectivement qu'on s'arrête à la notion de force 145 00:09:01,650 --> 00:09:02,410 obligatoire du contrat. 146 00:09:02,710 --> 00:09:05,680 Mais comme par hypothèse, les circonstances n'ont plus rien 147 00:09:05,880 --> 00:09:09,340 à voir avec ce qu'elles étaient au moment de l'accord de volonté, 148 00:09:09,700 --> 00:09:13,390 les parties n'ont jamais imaginé cette évolution, et donc il est 149 00:09:13,590 --> 00:09:17,590 faux de dire qu'appliquer le contrat, c'est appliquer leur volonté. 150 00:09:18,580 --> 00:09:24,880 Malgré ces critiques, la Cour de cassation a réaffirmé 151 00:09:25,080 --> 00:09:28,480 cette solution de principe de la révision pour imprévision. 152 00:09:31,120 --> 00:09:34,360 En plus des critiques doctrinales, ceci apparaissait d'autant plus 153 00:09:34,560 --> 00:09:38,980 critiquable que le droit français, comme je l'ai dit, était isolé 154 00:09:39,550 --> 00:09:42,030 au regard de tous les droits des pays voisins, c'est-à-dire que 155 00:09:42,280 --> 00:09:45,940 les pays voisins de la France ont admis la révision pour imprévision 156 00:09:46,300 --> 00:09:49,870 soit à la suite de modifications législatives, soit à la suite 157 00:09:50,070 --> 00:09:52,150 d'évolutions dans leur jurisprudence. 158 00:09:52,480 --> 00:09:56,920 De plus, les principes européens du droit des contrats vont reconnaître 159 00:09:57,190 --> 00:09:59,380 l'admission de la révision pour imprévision. 160 00:10:00,030 --> 00:10:05,550 Et même en droit interne, on va avoir une divergence 161 00:10:05,790 --> 00:10:10,290 d'appréciation par la jurisprudence, entre la jurisprudence administrative 162 00:10:10,500 --> 00:10:15,270 du Conseil d'État et la jurisprudence judiciaire rendue par la Cour de 163 00:10:15,470 --> 00:10:16,230 cassation. 164 00:10:16,430 --> 00:10:21,030 En effet, par un arrêt du 30 mars 1916, qu'on appelle l'arrêt Gaz de Bordeaux, 165 00:10:21,930 --> 00:10:26,940 le Conseil d'État va admettre la révision d'un contrat avec comme 166 00:10:27,140 --> 00:10:29,550 fondement — il est vrai, un fondement particulier au droit 167 00:10:29,750 --> 00:10:34,230 public —, la nécessité d'assurer la continuité du service public. 168 00:10:35,610 --> 00:10:40,290 Isolement du droit français, divergences d'appréciation selon 169 00:10:40,490 --> 00:10:43,380 le juge saisi, juge administratif ou juge judiciaire, mais il est 170 00:10:43,580 --> 00:10:46,350 vrai que les impératifs sont différents dans les deux cas. 171 00:10:47,190 --> 00:10:50,100 La Cour de cassation, finalement, n'est pas restée totalement 172 00:10:50,300 --> 00:10:54,000 insensible à ces critiques, à ces évolutions, et il y a eu, 173 00:10:54,720 --> 00:10:57,480 dans la jurisprudence judiciaire, cette jurisprudence a elle-même 174 00:10:58,110 --> 00:11:01,980 connu une évolution avec plusieurs arrêts, qui vont être rendus à 175 00:11:02,180 --> 00:11:03,570 partir de 1992. 176 00:11:03,870 --> 00:11:06,390 Curieusement, il y a plusieurs arrêts, un tous les six ans. 177 00:11:06,590 --> 00:11:08,790 Il y a quatre arrêts comme ça qui vont être mis en avant, 178 00:11:08,990 --> 00:11:12,180 notamment par les solidaristes, pour essayer de déceler dans la 179 00:11:12,380 --> 00:11:13,980 jurisprudence une évolution. 180 00:11:14,880 --> 00:11:19,290 Premier arrêt, un arrêt de la chambre commerciale du 3 novembre 1992, 181 00:11:19,490 --> 00:11:24,630 l'arrêt Huard, qui pose l'obligation de négocier à la charge des parties 182 00:11:24,830 --> 00:11:28,980 quand le contrat devient trop déséquilibré à la suite de l'évolution 183 00:11:29,180 --> 00:11:30,120 des circonstances économiques. 184 00:11:30,750 --> 00:11:33,570 Pas d'obligation de conclure, mais une obligation de renégocier 185 00:11:33,770 --> 00:11:36,150 qui s'impose d'après l'idée de bonne foi. 186 00:11:37,170 --> 00:11:41,250 Dans un arrêt de la chambre commerciale du 24 novembre 1998, 187 00:11:41,450 --> 00:11:45,780 ce qu'on appelle l'arrêt Chevassus, là encore, obligation pour une 188 00:11:45,980 --> 00:11:48,810 des parties au contrat, la partie forte, de permettre à 189 00:11:49,010 --> 00:11:51,990 un mandataire de pratiquer des prix concurrentiels, donc de 190 00:11:52,190 --> 00:11:56,070 renégocier, de permettre l'évolution des conditions contractuelles, 191 00:11:56,270 --> 00:12:01,170 pour permettre à un mandataire, dans un système de distribution, 192 00:12:01,410 --> 00:12:03,600 de pratiquer des prix concurrentiels. 193 00:12:03,900 --> 00:12:07,710 Puis deux arrêts à la portée plus discutée et plus discutable ont 194 00:12:07,910 --> 00:12:08,880 été rendus par la suite. 195 00:12:09,450 --> 00:12:12,240 Un arrêt de la première chambre civile du 16 mars 2004, 196 00:12:13,050 --> 00:12:16,560 qui a été plus discuté parce qu'il repose sur une interprétation a 197 00:12:16,760 --> 00:12:17,520 contrario. 198 00:12:17,720 --> 00:12:21,360 Et on sait que l'interprétation, a contrario, est parfois critiquable. 199 00:12:22,440 --> 00:12:27,540 D'après cet arrêt, en 2004, l'auteur du pourvoi invoquait un 200 00:12:27,740 --> 00:12:32,340 déséquilibre au moment de la formation du contrat, et non une modification 201 00:12:32,540 --> 00:12:36,420 postérieure des conditions contractuelles due à un changement 202 00:12:36,620 --> 00:12:37,620 des circonstances économiques. 203 00:12:37,820 --> 00:12:39,840 Ça, c'est ce que relève la Cour de cassation. 204 00:12:40,260 --> 00:12:44,700 Et a contrario, certains auteurs ont estimé que la Cour de cassation 205 00:12:44,900 --> 00:12:49,950 voulait dire que si l'auteur du pourvoi avait invoqué une modification 206 00:12:50,150 --> 00:12:54,480 postérieure à la conclusion du contrat, peut-être qu'alors, la révision 207 00:12:54,680 --> 00:12:59,560 pour imprécision aurait été acceptée, aurait été admise par le juge. 208 00:12:59,760 --> 00:13:03,660 Mais on voit la fragilité de cette interprétation qui est ici une 209 00:13:03,860 --> 00:13:05,130 interprétation a contrario. 210 00:13:05,330 --> 00:13:09,630 Enfin, dans un arrêt de la chambre commerciale du 29 juin 2010, 211 00:13:10,500 --> 00:13:14,550 il est prononcé la cassation d'un arrêt, donc par la Cour de cassation, 212 00:13:14,850 --> 00:13:18,810 car le juge, d'après la haute juridiction, n'a pas recherché 213 00:13:19,350 --> 00:13:22,980 si l'évolution des circonstances économiques n'avait pas eu pour 214 00:13:23,180 --> 00:13:27,960 effet de déséquilibrer l'économie générale du contrat tel que voulu 215 00:13:28,200 --> 00:13:33,030 par les parties lors de sa signature, et de priver de toute contrepartie 216 00:13:33,230 --> 00:13:37,350 réelle l'engagement souscrit par le cocontractant, ce qui était 217 00:13:37,550 --> 00:13:41,850 de nature à rendre sérieusement contestable l'obligation dont l'autre 218 00:13:42,050 --> 00:13:44,580 cocontractant sollicite l'exécution. 219 00:13:44,780 --> 00:13:47,780 Ce qui est important ici, c'était un arrêt suite à un référé, 220 00:13:47,980 --> 00:13:51,120 c'est pour ça qu'on parle de l'obligation sérieusement contestable, 221 00:13:51,320 --> 00:13:54,240 qui justifie la compétence ou non du juge des référés. 222 00:13:54,440 --> 00:13:57,120 Mais ce qui est important dans l'arrêt de 2010, c'est que c'est 223 00:13:57,320 --> 00:14:01,310 un arrêt qui se fonde sur l'idée de contrepartie, de cause à l'époque, 224 00:14:01,560 --> 00:14:05,340 et on va rechercher s'il y a une contrepartie réelle à l'engagement. 225 00:14:06,660 --> 00:14:10,740 Quatre arrêts, 1992, 1998, 2004, 2010. 226 00:14:11,280 --> 00:14:15,890 Ça ne fait pas beaucoup pour contester cette jurisprudence qui datait de 1876. 227 00:14:16,090 --> 00:14:19,920 Néanmoins, ce sont des arrêts qui ont été mis en avant par, 228 00:14:20,130 --> 00:14:25,140 je le répète, les tenants d'un assouplissement de la jurisprudence 229 00:14:25,340 --> 00:14:26,100 Canal de Craponne. 230 00:14:26,520 --> 00:14:31,260 Mais ce que relèvent d'autres auteurs, davantage attachés au maintien 231 00:14:31,460 --> 00:14:34,440 de la solution, c'est qu'à chaque fois, l'interprétation est discutable. 232 00:14:34,710 --> 00:14:41,190 Parce qu'en 1992 ou en 1998, les circonstances de l'espèce visent 233 00:14:41,490 --> 00:14:44,670 des hypothèses dans les contrats de distribution, où l'idée de bonne 234 00:14:44,870 --> 00:14:50,490 foi, l'idée de loyauté peut être plus poussée que dans les contrats 235 00:14:50,690 --> 00:14:51,450 de droit commun. 236 00:14:51,650 --> 00:14:55,890 En tout cas, ce qu'il faut retenir, c'est que même si certains arrêts 237 00:14:56,090 --> 00:14:59,880 semblaient remettre en cause la solution antérieure, 238 00:15:00,440 --> 00:15:03,080 la cour de Cassation ne va pas l'abandonner explicitement, 239 00:15:03,920 --> 00:15:09,410 et que le débat restait important avant la réforme de 2016. 240 00:15:10,070 --> 00:15:14,780 La pratique, évidemment, n'a pas attendu l'évolution de la loi, 241 00:15:15,320 --> 00:15:18,740 l'évolution de la jurisprudence ou un changement dans la loi qui 242 00:15:18,940 --> 00:15:24,680 tardait à venir, et donc la pratique a créé évidemment des mécanismes 243 00:15:24,880 --> 00:15:29,900 destinés à lutter contre un changement imprévu des circonstances économiques, 244 00:15:30,260 --> 00:15:34,040 en prévoyant des clauses, des clauses de renégociation des 245 00:15:34,240 --> 00:15:37,370 contrats, qu'on appelle les clauses de hardship, et des clauses 246 00:15:37,570 --> 00:15:41,030 d'adaptation aux nouvelles circonstances qui vont par exemple 247 00:15:41,810 --> 00:15:43,910 consister dans des clauses d'indexation. 248 00:15:44,110 --> 00:15:48,650 On va choisir un indice et le prix de la prestation va varier en fonction 249 00:15:49,040 --> 00:15:50,270 de l'évolution de cet indice. 250 00:15:50,600 --> 00:15:52,280 C'était tout à fait licite. 251 00:15:52,670 --> 00:15:54,980 Que ce soit à l'origine dans le commerce international ou, 252 00:15:55,180 --> 00:15:58,040 après, dans le droit interne, les parties évidemment se sont 253 00:15:58,240 --> 00:15:59,000 adaptées. 254 00:16:00,050 --> 00:16:05,840 Mais aujourd'hui, avec l'article 1195, il y a un changement majeur dans 255 00:16:06,040 --> 00:16:09,800 le droit des contrats français puisqu'on va admettre la révision 256 00:16:10,000 --> 00:16:11,030 pour imprévision. 257 00:16:11,230 --> 00:16:14,850 Néanmoins, ce qu'il faut bien comprendre, c'est que la révision 258 00:16:15,050 --> 00:16:18,860 pour imprévision n'est pas admise directement, mais la révision pour 259 00:16:19,060 --> 00:16:23,090 imprévision est admise comme suite de mécanismes de renégociation 260 00:16:23,290 --> 00:16:24,050 qui auraient échoué. 261 00:16:24,830 --> 00:16:28,400 En fait, ça apparaît comme l'ultime remède entre les mains du juge 262 00:16:28,700 --> 00:16:31,190 si tous les autres moyens ont échoué. 263 00:16:32,300 --> 00:16:36,320 Cette révision pour imprévision repose d'abord sur trois conditions. 264 00:16:36,520 --> 00:16:39,410 Il y a trois conditions qui sont posées pour que le juge puisse 265 00:16:39,610 --> 00:16:40,370 ensuite intervenir. 266 00:16:40,570 --> 00:16:46,040 D'abord, il faut un changement de circonstances imprévisibles 267 00:16:46,520 --> 00:16:48,200 au moment de la formation du contrat. 268 00:16:48,400 --> 00:16:54,260 Ensuite, ce changement de circonstances doit rendre l'exécution du contrat 269 00:16:54,770 --> 00:16:56,360 excessivement onéreuse. 270 00:16:56,560 --> 00:16:57,350 Donc pas de seuil. 271 00:16:57,550 --> 00:16:59,660 Là, problème d'interprétation par le juge. 272 00:16:59,860 --> 00:17:03,590 Qu'est-ce qui sera excessivement onéreux de ce qui devient un peu 273 00:17:03,790 --> 00:17:06,620 plus difficile pour une partie dans l'exécution du contrat ? 274 00:17:06,820 --> 00:17:10,940 Et enfin, troisième condition : il faut que cette évolution rende 275 00:17:11,140 --> 00:17:15,830 excessivement onéreuse l'exécution du contrat pour la partie qui n'avait 276 00:17:16,030 --> 00:17:18,290 pas accepté d'en assumer le risque. 277 00:17:18,490 --> 00:17:21,740 Cela veut dire, et j'y reviendrai, qu'une partie peut tout à fait 278 00:17:21,940 --> 00:17:25,280 couvrir le risque d'évolution des circonstances et accepter, 279 00:17:25,640 --> 00:17:28,670 en connaissance de cause, que le contrat ne serait pas révisé 280 00:17:28,870 --> 00:17:30,650 malgré un changement de circonstances. 281 00:17:31,850 --> 00:17:34,100 Le contrat devient plus difficile à exécuter. 282 00:17:34,300 --> 00:17:36,740 Attention, ça veut dire qu'il n'y a pas de force majeure ici. 283 00:17:37,010 --> 00:17:38,540 Une partie peut toujours exécuter. 284 00:17:38,960 --> 00:17:41,630 Si elle est dans l'impossibilité d'exécuter sa prestation, 285 00:17:41,830 --> 00:17:46,190 la force majeure va jouer et elle va entraîner ce qu'on verra plus loin, 286 00:17:46,390 --> 00:17:48,940 c'est-à-dire un effet de libération des parties. 287 00:17:49,140 --> 00:17:52,490 Si on est en présence de ces trois conditions, alors qu'est-ce qu'il 288 00:17:52,690 --> 00:17:53,450 va se passer ? 289 00:17:53,650 --> 00:17:56,780 C'est là que l'article 1195 prévoit différentes étapes. 290 00:17:56,980 --> 00:18:02,570 Première étape : il peut y avoir une demande de renégociation du 291 00:18:02,770 --> 00:18:03,530 contractant. 292 00:18:03,730 --> 00:18:06,560 Celui qui se ruine va demander à l'autre de renégocier le contrat. 293 00:18:06,760 --> 00:18:09,980 Ce que la loi prévoit, c'est que pendant la renégociation 294 00:18:10,180 --> 00:18:12,290 éventuelle qui va s'ouvrir, pendant la négociation, 295 00:18:12,920 --> 00:18:16,520 le contrat sera exécuté, le contrat doit continuer à être 296 00:18:16,720 --> 00:18:17,480 exécuté. 297 00:18:17,680 --> 00:18:21,410 Il s'agit ici d'éviter une demande intempestive de renégociation qui 298 00:18:21,610 --> 00:18:24,380 serait là pour faire gagner du temps à la partie faible. 299 00:18:24,580 --> 00:18:27,350 Il s'agit donc d'éviter des contestations qui n'auraient qu'un 300 00:18:27,550 --> 00:18:28,400 but dilatoire. 301 00:18:29,270 --> 00:18:31,790 Rien n'est prévu sur le déroulement des négociations. 302 00:18:32,270 --> 00:18:35,870 On peut naturellement ici faire jouer l'idée de bonne foi. 303 00:18:36,070 --> 00:18:38,270 La négociation doit avoir lieu de bonne foi. 304 00:18:38,470 --> 00:18:39,890 Il n'y a pas d'obligation de conclure. 305 00:18:40,100 --> 00:18:42,500 Simplement, il faut négocier loyalement. 306 00:18:43,530 --> 00:18:47,930 S'il y a refus de cette renégociation ou échec de la négociation, 307 00:18:48,380 --> 00:18:51,290 à ce moment-là il y a deux possibilités pour les parties. 308 00:18:51,490 --> 00:18:55,400 Soit elles peuvent demander la résolution du contrat à des conditions 309 00:18:55,600 --> 00:19:00,020 qu'elles vont déterminer, soit elles vont demander d'un commun 310 00:19:00,220 --> 00:19:04,220 accord au juge de procéder à l'adaptation du contrat. 311 00:19:04,760 --> 00:19:08,780 Mais ici, on pourrait se demander quel va être l'intérêt de la partie 312 00:19:08,980 --> 00:19:11,990 forte, celle qui va bénéficier du changement de circonstances. 313 00:19:12,320 --> 00:19:17,390 Quel serait son intérêt de s'adresser au juge pour adapter le contrat si, 314 00:19:17,590 --> 00:19:21,530 déjà, elle a refusé par elle-même une négociation volontaire ? 315 00:19:22,970 --> 00:19:28,010 La loi prévoit ici qu'à défaut d'accord, dans un délai raisonnable, 316 00:19:28,520 --> 00:19:33,890 le juge peut, à la demande d'une seule partie, réviser le contrat 317 00:19:34,090 --> 00:19:34,850 ou y mettre fin. 318 00:19:35,300 --> 00:19:39,530 C'est là qu'apparaît, en troisième lieu, la possibilité 319 00:19:39,730 --> 00:19:43,100 d'une révision pour imprévision, s'il y a eu échec de la demande 320 00:19:43,300 --> 00:19:45,650 de renégociation ou s'il n'y a pas d'accord des parties pour 321 00:19:45,850 --> 00:19:48,680 s'adresser au juge ou pour mettre fin au contrat. 322 00:19:49,070 --> 00:19:52,970 C'est seulement si les autres moyens ont échoué que le juge va à ce 323 00:19:53,170 --> 00:19:57,950 moment-là être autorisé à intervenir dans l'équilibre contractuel à 324 00:19:58,150 --> 00:19:59,060 la demande d'une seule partie. 325 00:19:59,510 --> 00:20:03,560 C'est ça, le vrai mécanisme de la révision pour imprévision, 326 00:20:03,890 --> 00:20:07,520 qui est introduit dans l'article 1195 du Code civil. 327 00:20:08,930 --> 00:20:12,410 Ce mécanisme, qui est l'ultime remède, certains auteurs ont bien montré 328 00:20:12,610 --> 00:20:15,440 qu'en réalité, il allait sûrement jouer un rôle préventif. 329 00:20:16,100 --> 00:20:20,930 Pour éviter une intervention du juge qui déboucherait sur un certain 330 00:20:21,130 --> 00:20:23,780 aléa — et les parties ne savent pas ce que le juge va adapter, 331 00:20:23,980 --> 00:20:28,130 ce qu'il va modifier dans le contrat —, pour éviter cette intrusion du 332 00:20:28,330 --> 00:20:31,610 juge dans le contrat, les parties ont tout intérêt à 333 00:20:31,810 --> 00:20:36,260 se mettre d'accord et à utiliser les deux voies qui sont prévues 334 00:20:36,460 --> 00:20:39,380 avant par la loi, c'est-à-dire soit renégocier de bonne foi, 335 00:20:39,710 --> 00:20:43,370 soit mettre fin tout simplement au contrat, en tout cas adapter 336 00:20:43,570 --> 00:20:46,610 elle-même le contrat, pour éviter une intervention du 337 00:20:46,810 --> 00:20:50,930 juge qui laisse place, laisse planer une certaine incertitude 338 00:20:51,130 --> 00:20:54,860 que va décider le juge, et quelle clause il va par exemple 339 00:20:55,060 --> 00:20:56,840 modifier dans le contrat. 340 00:20:57,380 --> 00:21:01,340 Par peur de cette intervention du juge, les parties seront amenées, 341 00:21:01,540 --> 00:21:05,180 sans doute de manière préventive, à elles-mêmes adapter le contrat. 342 00:21:06,710 --> 00:21:09,890 La faiblesse du texte, c'est que c'est un texte qui n'est 343 00:21:10,090 --> 00:21:11,450 pas d'ordre public. 344 00:21:11,960 --> 00:21:16,520 Ça veut dire que dans un contrat, les parties pourront tout à fait 345 00:21:16,720 --> 00:21:21,740 librement, par une clause adaptée, mettre de côté ce mécanisme prévu 346 00:21:21,940 --> 00:21:26,780 par l'article 1195, et prévoir que la révision pour imprévision 347 00:21:27,530 --> 00:21:31,070 ne sera pas possible, que le mécanisme prévu ne pourra 348 00:21:31,270 --> 00:21:32,450 pas jouer entre elles. 349 00:21:32,650 --> 00:21:34,580 Et à ce moment-là, elles se mettront d'accord. 350 00:21:34,780 --> 00:21:39,770 Ou alors, une des parties va accepter par avance le risque d'une évolution 351 00:21:39,970 --> 00:21:40,730 des circonstances. 352 00:21:41,750 --> 00:21:44,990 La révision pour imprévision, aujourd'hui admise comme ultime 353 00:21:45,190 --> 00:21:50,030 remède dans l'article 1195, montre que dans ce conflit entre 354 00:21:50,230 --> 00:21:55,130 la force obligatoire et l'idée de bonne foi, c'est un des éléments 355 00:21:55,330 --> 00:22:00,890 dans la réforme de 2016 qui a mis en avant et a fait triompher 356 00:22:01,400 --> 00:22:04,760 l'obligation de bonne foi sur la conception antérieure, 357 00:22:04,960 --> 00:22:07,970 qui était davantage attachée à la force obligatoire. 358 00:22:08,570 --> 00:22:10,910 On verra par la suite, notamment dans les mécanismes de 359 00:22:11,110 --> 00:22:15,170 résolution du contrat, que la force obligatoire a connu 360 00:22:15,370 --> 00:22:21,620 d'autres atteintes, d'autres atteintes au niveau du principe posé auparavant, 361 00:22:21,820 --> 00:22:23,690 avant la réforme, de manière intangible. 362 00:22:23,890 --> 00:22:27,680 Ici, on a une première exception, on en reverra d'autres. 363 00:22:28,580 --> 00:22:34,100 C'est donc ici le triomphe mesuré des solidaristes. 364 00:22:35,300 --> 00:22:39,980 L'idée de bonne foi va permettre au juge d'adapter le contrat lorsqu'on 365 00:22:40,180 --> 00:22:42,890 sera face à une situation d'imprévision.